La construction des coupoles géodésiques a été particulièrement développée par l'architecte américain Richard Buckminster Fuller. L'une de ses géodes les plus remarquables est un dôme (lien) géodésique transparent de 80 m de diamètre qui fut construit sur l'île Sainte-Hélène à Montréal en 1967 pour être le pavillon des États-Unis à l'exposition universelle de Montréal et qui abrite aujourd'hui la Biosphère.
La plupart des géodes sont bâties sur le principe suivant : on part d'un icosaèdre.
Il faut noter que chacun des sommets de l'icosaèdre est commun à cinq facettes triangulaires, adjacentes deux à deux, et que cinq arêtes (côtés des facettes) partent de chacun de ces sommets.
Chaque facette de l'icosaèdre est un triangle équilatéral, que l'on va subdiviser en triangles plus petits qui sont ensuite déformés (par projection radiale) pour être amenés sur la sphère circonscrite à l'icosaèdre. Voici trois exemples de géodes, correspondant chacun à une subdivision différente :
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Dans le premier exemple, on a divisé les arêtes des faces de l'icosaèdre en deux segments. Dans le second, les arêtes ont été divisées en trois. Enfin, dans le dernier, elles ont été divisées en dix segments. C'est d'ailleurs sur ce dernier modèle qu'est bâtie la Géode de la Cité des sciences et de l'industrie de la Villette.
Pour repérer l'emplacement des sommets de l'icosaèdre initial, il suffit de trouver les endroits où 5 petits triangles (au lieu de 6) partagent un même sommet !
On peut également concevoir des géodes en nid d'abeille en prenant le polyèdre dual des géodes obtenues par triangulation.
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Dans la figure ci-dessus (qui est la figure agrandie du polyèdre dual de la géode du dernier exemple précédent basé sur une subdivision en 10 segments), la sphère semble pavée d'hexagones. Mais une observation attentive permet de découvrir que parmi ces hexagones se cachent en fait douze pentagones correspondant aux sommets de l'icosaèdre initial. Il est en effet impossible de recouvrir une sphère en n'utilisant que des hexagones, comme le montre la relation d'Euler entre nombres de faces, d'arêtes et de sommets d'un polyèdre, quel qu'il soit.
Sur la figure, trois de ces 12 pentagones sont bien visibles, un quatrième, peu visible, se trouve près du bord de la figure, dans la direction " onze heures " (que marquerait la grande aiguille d'une montre), enfin un cinquième se cache sur le rebord de la figure, à " trois heures et demie " !
Les dômes géodésiques sont des structures basées sur la division (partition) des faces d'un polyèdre régulier dont les faces sont constituées de triangles équilatéraux.
Il n'existe que 3 types de polyèdres réguliers possédant de telles faces équilatérales : le tétraèdre régulier (N = 3), l'octaèdre régulier (N = 4) et l'icosaèdre régulier (N = 5), la notation N utilisée ici représentant le nombre de faces (et aussi le nombre d'arêtes) qui partagent un même sommet.
La division des faces est définie par deux paramètres entiers a et b, positifs ou nuls.
Le premier paramètre a doit être strictement positif.
Le second paramètre b peut être nul mais ne doit pas être supérieur à a.
Une fois choisies les valeurs de N puis de a et de b, la construction du dôme correspondant, que par la suite nous noterons " Géode M-a-b " (notation où le M doit être remplacé par III, IV ou V, selon la valeur en chiffres romains du nombre N), se déroule en 6 étapes, que nous allons expliquer en détail en privilégiant le cas N = 5 (qui correspond à l'immense majorité des géodes) et en l'illustrant dans les 3 cas suivants :
Remarque : les figures qui précèdent correspondent, en utilisant la notation expliquée ci-dessus, aux géodes suivantes :
On construit un polyèdre régulier (R) correspondant à la valeur de N
Les arêtes obtenues à l'étape précédente forment des triangles sphériques, qui sont la projection radiale des petits triangles équilatéraux résultant de la division des faces du polyèdre initial (R).
Il faut bien sûr effacer le tracé de la géode normale quand on a fini de tracer les arêtes de la géode duale.
Si l'on choisit comme polyèdre de départ (R) un octaèdre régulier (correspondant pour N à la valeur 4).
la construction exposée ci-dessus conduit à l'étape n° 6 aux résultats suivants :
Si l'on choisit enfin comme polyèdre de départ (R) un tétraèdre régulier (correspondant pour N à la valeur 3).
la même construction conduit à l'étape n° 6 aux résultats suivants :
Lorsque le paramètre b est nul ou égal au paramètre a, la géode (normale ou duale) possède toutes les propriétés de symétrie de son polyèdre générateur ; par exemple, pour l'icosaèdre : 15 plans de symétrie (passant par deux arêtes opposées), 10 rotations d'ordre 3 (rotation de 120° autour d'un axe passant par le centre de l'une des 20 faces) et 6 rotations d'ordre 5 (rotation de 72° autour d'un axe passant par deux sommets opposés)
En revanche, lorsque les paramètres a et b sont différents et tous deux positifs, la géode perd ses plans de symétrie et il existe donc deux formes de géodes de type N-a-b, qui sont énantiomorphes (c'est-à-dire symétriques l'une de l'autre dans un miroir, sans être superposables) ; pour s'en convaincre, il suffit de permuter les lettres A et B dans les explications données ci-dessus aux étapes n° 2 et 3 et d'examiner attentivement les figures correspondantes (dans le cas V-5-3) ou la figure ci-dessous :
Si l'on choisit
La quantité
Les arêtes d'un dôme géodésique normal (G) forment une triangulation de Delaunay de l'ensemble de ses sommets ; en outre, le dôme géodésique dual du même dôme (G) constitue une partition de la sphère (S) mais il ne correspond pas rigoureusement au diagramme de Voronoï des sommets du dôme (G), notamment pour les faibles valeurs de la densité
Il n'est pas mathématiquement illogique de s'intéresser encore à un autre type de dômes géodésiques, ceux que l'on pourrait obtenir à partir d'une division (partition) des faces d'un autre polyèdre régulier, le cube ; cette division consisterait à découper chacune des six faces carrées du cube en mini-carrés. Pour construire de tels dômes " quadrangulés ", il suffirait, à l'étape 2 décrite ci-dessus, de diviser l'une des deux diagonales BD d'une face ABCD (carrée) du cube en
Nota : le formulaire qui suit n'inclut pas le cas particulier des géodes " quadrangulées "
Pour calculer les nombres F, A et S représentant les nombres de faces, d'arêtes et de sommets d'un dôme géodésique de paramètres N, a et b, il faut commencer par calculer les nombres f et D (qui représentent respectivement le nombre de faces du polyèdre régulier générateur (R) et la " densité " de la division des faces de ce polyèdre) à l'aide des deux formules préliminaires suivantes :
On peut ensuite calculer :
Détails complémentaires :
Quelque 300 000 géodes ont été construites à travers le monde. Elles peuvent servir à de très nombreux usages : lieux publics (musées, lieux d'exposition, salles de spectacle, lieux de compétition sportive ou d'entraînement…), centres commerciaux, structures provisoires (forums, expositions, salons, tentes collectives ou individuelles…), habitations collectives (expéditions scientifiques…), structures à usage technique, abris divers (entrepôts, hangars, garages, couverture de réservoirs, abris de jardin), et même habitations privées (bien que cet usage présente de sérieux (en) inconvénients)…
Généralement, le polyèdre générateur est un icosaèdre orienté de telle sorte que l'un de ses 12 sommets (ou le centre de l'une de ses 20 faces) se trouve au point le plus haut de l'édifice. Ceci présente un intérêt non seulement esthétique, mais aussi pratique pendant la phase de construction de la structure (un mât central vertical permettant de soulever l'ouvrage, au fur et à mesure que de nouveaux éléments lui sont ajoutés).
Il est exceptionnel qu'une géode soit complète : le plus souvent, on n'en construit que la partie supérieure et il est d'usage d'indiquer par une fraction simple (et donc approximative) le rapport entre la hauteur de la structure et le diamètre de la sphère circonscrite au polyèdre générateur.
En toute rigueur, on devrait appeler " sphère géodésique " les géodes complètes, et réserver la dénomination de " dôme géodésique " ou " coupole géodésique " aux géodes incomplètes.
Quand une géode est de grandes dimensions, il peut être intéressant, au point de vue architectural, d'en renforcer la cohésion en superposant deux coupoles géodésiques, duales l'une de l'autre. Il y a deux façons de réaliser ce renforcement :
Le principe de ce renforcement consiste :
Le schéma ci-dessus montre, dans sa partie supérieure, une géode normale intérieure doublée d'une géode duale extérieure, et dans sa partie inférieure, une géode normale extérieure doublée d'une géode duale intérieure.
Dans la typologie qu'il a établie, l'architecte américain Richard B. Füller qui a mis en évidence l'intérêt des dômes géodésiques pour la construction de grandes structures en forme de coupole, nomme " fréquence " d'une géode la quantité a + b.
Il distingue 3 classes de dômes géodésiques : les dômes les plus simples (avec b = 0) correspondent à la classe I (ils sont dits " triacon "), ceux de la classe II correspondent aux cas où a = b (ils sont dits " alternate "), et enfin la classe III englobe tous les dômes dits " twisted " (c'est-à-dire tournants ou tors en français) pour lesquels b n'est ni nul ni égal à a. Mais selon d'autres sources (ou auteurs), les classes I et II correspondraient respectivement aux cas a = b (" alternate ") et b = 0 (" triacon ")
Certains auteurs contestent que Fuller soit l'inventeur des dômes géodésiques et justifient leur point de vue en rappelant que dès 1922, l'ingénieur Walter Bauersfeld, travaillant chez Zeiss, a eu l'idée d'une structure de type V-1-1 duale pour la construction, à Iena, du premier planétarium ouvert au public. Toutefois, il semble bien que Bauersfeld n'ait vu dans cette idée que la solution d'un problème optique et qu'il n'ait pas entrevu la possibilité d'une généralisation de cette idée à la construction de vastes bâtiments à usage général.
Il semble qu'aucun dôme géodésique de classe III et de grandes dimensions n'ait été réalisé par un architecte, probablement parce que la construction en est un peu plus compliquée, sans contrepartie d'ordre esthétique…
De même, aucun dôme géodésique correspondant à N = 3 ou à N = 4 n'a été construit par un architecte ; ceci s'explique aisément par la très grande dispersion des longueurs des arêtes, celle-ci entraînant à la fois une beaucoup plus grande fragilité et une esthétique assez peu agréable, surtout lorsque N = 3 ; ces dômes sont donc de pures curiosités mathématiques !
De même, et pour les mêmes raisons, aucune géode quadrillée (à base de cube) n'a été construite !
Voici, classés par ordre de diamètre décroissant, les dômes géodésiques réputés comme les dix plus grands au monde :
Autres dômes géodésiques remarquables :
En France, on peut recenser un certain nombre de dômes géodésiques, en commençant par les plus connus :
Une géode V-1-1 duale a exactement la structure des ballons de football en usage dans les compétations officielles : sur ces ballons, les 12 pentagones sont teints en noir tandis que les 20 hexagones sont teints en blanc.
Les balles de golf sont creusées de petits alvéoles dont le nombre, la forme et la position peuvent améliorer les performances des joueurs ; parmi les balles de golf professionnelles, on rencontre fréquemment des balles dont la disposition des alvéoles circulaires reproduit celle des faces (hexagones et pentagones) d'une géode V-6-0 duale.
Certains composés organiques remarquables tels que les C60 dont la structure est proche des géodes V-1-1 ont été baptisés fullerènes en hommage à R. B. Fuller ; on les appelle aussi parfois " footballènes ".
La majorité des virus sont des " virus icosaédraux " (en anglais " icosahedral viruses ") ou plus exactement des " virus à nucléocapside icosaédrale " : leur particularité tient à leur structure qui, très proche de celle d'un dôme géodésique, normal ou dual (sans toutefois la projection radiale sur la sphère (S)), leur confère une grande stabilité. Ils correspondent toujours à N = 5 et le plus souvent à des valeurs faibles de a et de b.
Parmi ces nombreux virus, on peut citer ceux des hépatites A, B, C et E, celui de la poliomyélite, celui du sida (HIV-1), celui de la fièvre jaune, celui de la variole, celui de la fièvre aphteuse, le virus habituel de la bronchiolite (VRS), ceux des verrues communes et plantaires (Papillomavirus HPV-3 et HPV-1), celui de la rubéole ou encore celui du " rhume de cerveau " ; mentionnons aussi le groupe des 8 virus dits herpesviridae qui possèdent tous la structure V-5-0 et qui peuvent induire différentes maladies humaines : varicelle, zona, mononucléose infectieuse, herpès labial, herpès néonatal et MST telles que l'herpès génital simple et l'herpès à cytomégalovirus.
Certains de ces virus sont " twisted " et correspondent donc à la classe III de Fuller : par exemple le Polyomavirus et le Papillomavirus qui sont du type V-2-1. On connaît même un virus de type V-10-7 (celui qui infeste l'algue Phaeocystis pouchetii).
les trois polyèdres réguliers dont les faces sont des triangles équilatéraux correspondent pour Platon aux éléments feu, air et eau. Plus précisément, dans son Timée, Platon, évoquant la façon dont le Créateur a façonné l'Univers, fait correspondre le tétraèdre au feu, l'octaèdre à l'air et l'icosaèdre à l'eau (le cube étant associé à la terre).