Minitel - Définition

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Le Minitel est une technologie de communication télématique développée par la DGT (Ministère des Postes et Télécommunications) et utilisée en France, essentiellement dans les années 1980 et 1990.

Contexte historique

Le Minitel 1, sorti en 1982
Le Minitel 1, sorti en 1982

On a quelque temps dit du Minitel la même chose que du Concorde ou d'Ariane, à savoir : " Avant même sa sortie, ce projet sera techniquement dépassé ". Comme dans les deux cas précédents, il n'en fut rien.

Le concurrent américain du Minitel se nommait en effet le système NAPLPS. Conçu comme vecteur de vente à domicile, il mettait l'accent sur un affichage en couleurs de qualité photographique.

Les lignes - surtout aux États-Unis - étant ce qu'elles étaient à l'époque, la déception fut sévère :

  • l'affichage de certaines pages pouvait prendre une durée de six minutes ;
  • le mixage de texte et de graphiques, qui ne posait pas de problème avec les caractères semigraphiques de basse qualité du Minitel, n'était pas possible sans faire monter le coût de réalisation du terminal à des valeurs prohibitives en RAM et en ROM.

Seuls restèrent en lice le Minitel, le Prestel, le Ceefax, le Bildschirmtext - tous en Europe, tous fondés sur la norme Vidéotex. La réalisation du Minitel ayant été confiée à trois industriels différents (Matra, Radiotechnique (Philips) et Télic-Alcatel), le prix des séries put être négocié au plus bas en tenant compte d'une courbe d'apprentissage des sous-traitants.

Facturation

Le Minitel était sans abonnement, en tout cas les premiers modèles, prêtés par France Télécom à ses abonnés, mais facturé au temps de communication. La facture s'en effectuait par comptabilisation sur la facture téléphonique. Le serveur pouvait être branché chez soi (n° d'appel direct) ou bien sur un des kiosques (3613, 3614, 3615, etc.).

Expérimentation

La phase d'expérimentation se réalise à partir de 1980 à travers deux opérations sur le terrain :

L'expérience Télétel 3V

À l'automne 1980, 2 500 foyers volontaires de Versailles, Vélizy-Villacoublay, Jouy-en-Josas, Buc, Bièvres et Les Loges-en-Josas reçoivent un terminal vidéotex. Du côté des services, près de 200 fournisseurs participent à l'expérience, se donnant ainsi l'occasion de tester ce nouveau moyen de communication auprès du public. Les services remportant la plus large adhésion seront la presse, la vente par correspondance, la SNCF, les banques ainsi que la messagerie.

Le premier terminal n'a pas d'écran, et se glisse sous le téléviseur. La télécommande est basique : juste un clavier alpha-numérique en majuscules. Un groupe d'utilisateurs passionnés fonde l'AATEL (Association des Abonnés à Teletel), qui devient une véritable interface entre les testeurs et la DGT-DACT (Direction Générale des Telecommunications-Direction des Affaires Commerciales et Télématiques) qui dirige le projet. De leur côté, les entreprises créent l'AFTEL (Association française des fournisseurs de services télématiques). Les liaisons distantes sont établies via le réseau TRANSPAC par le numéro d'accès 612 34 56.

La toute première messagerie, uniquement par boîtes aux lettres, est baptisée M3V. On peut y échanger des messages privés, ou par l'intermédiaire de groupes thématiques de discussion. À l'époque, la DACT et les fournisseurs de services pensent qu'il ne s'agit que d'un gadget ludique : pour eux l'avenir de la télématique réside dans l'information, et non la communication. Il est même question de la supprimer, mais l'AATEL se battra pour la conserver et démontrer qu'elle est une motivation primordiale des utilisateurs. Ce que confirmera allègrement le développement de la télématique grand public en France. C'est seulement fin 1982 qu'apparaît le premier minitel. L'expérience sera définitivement close au printemps 1984.

L'annuaire électronique

En 1981, 4 000 Minitels sont distribués en Ille-et-Vilaine. Il s'agit de tester ce nouveau service chargé de remplacer l'annuaire papier. Il devait aussi alors alléger le service traditionnel des renseignements, passablement saturé devant la croissance du parc téléphonique lors des années 1970. Il se justifiait aussi par un service de renseignements recouvrant l'ensemble des abonnés de France et par une remise à jour quotidienne. Cette expérience s'étant déroulée à Vélizy, le nom de la ville est devenu un terme générique dans le jargon du milieu de la télématique.

En effet, lancé en France en 1982 par les PTT (aujourd'hui La Poste et France Télécom), propriété de l'État, il permet d'accéder à des services en ligne dont les plus populaires sont

  • 3611 : anciennement, le 11, l'annuaire téléphonique (payant depuis le 01/09/2007),
  • la vente par correspondance (de billets de train par exemple),
  • et les sites de rencontres et messageries roses.

L'État français, propriétaire des PTT a fortement encouragé le développement du Minitel. Les PTT ont ainsi distribué gratuitement les terminaux (des terminaux plus évolués ont ensuite été vendus ou loués). Cette décision était motivée par les économies de fabrication, de distribution et de recyclage de millions d'annuaires papier chaque année. Ainsi, les foyers équipés de Minitel ne recevaient plus que les pages jaunes, au lieu des pages blanches et des pages jaunes.

Les services télématiques

Le programme Minitel revint à plus de 8 milliards de francs en équipements de terminaux avec une durée de vie estimée de 8 ans pour les Minitels. Pendant le même laps de temps, le chiffres d'affaire des services télématiques atteint les 3,5 milliards de francs et les économies de papier atteignirent 500 millions de francs par an.

En 1985 on a dépassé le million de Minitels en service en France, ainsi que le million d'heures de communications de services par mois. En 2000, le Minitel était utilisé par près de 25 millions de personnes (sur 60 millions d'habitants) avec un parc de près de 9 millions de terminaux. Il dépassait le nombre d'utilisateurs du réseau CompuServe, qui offrait en Amérique des services semblables, et plus encore de Prodigy qui lui ressemblait davantage parce qu'utilisant le code Vidéotex.

Le réseau de minitels comportait au départ trois types de facturation :

  • 3613 : communication payée par le service
  • 3614 : communication payée par l'usager (20 FF - 3,05 €/heure environ), pas de rémunération du service.
  • 3615 : rémunération du service : (60 FF - 9,15 €/heure environ) payés par l'usager, dont 40 FF (6,10 €) pour le service et 20 FF (3,05 €) pour France Telecom.

Ces numéros courts à 4 chiffres ont remplacé les numéros initiaux, au gré de l'évolution du plan de numérotation de l'opérateur historique :

  • 11 jusqu'au 18 octobre 1996 à 23h, puis 3611.
  • (16) (3) 613 91 55, puis 36 13 91 55 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3613 depuis le 10 juillet 1986
  • (16) (3) 614 91 66, puis 36 14 91 66 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3614 depuis le 10 juillet 1986
  • (16) (3) 615 91 77, puis 36 15 91 77 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3615 depuis le 10 juillet 1986

Le Minitel reste toujours très utilisé (2002), y compris pour les transactions commerciales, à tel point que certains moteurs de recherche comme Yahoo! ou AltaVista ont ouvert un service Minitel. Mais les services à facturation de type 3615 ou supérieur sont vivement concurrencés par le Web.

Le Web a les avantages suivants : bien plus ergonomique, plus rapide, et surtout le Web est censé être gratuit.

Le Minitel a les avantages suivants : pas d'abonnement, pas de matériel à acheter, fiabilité constante, sécurisé.

Minitel est un nom déposé, et donc s'écrit toujours avec une majuscule.

Les serveurs (n° de tél.) auxquels on se connectait avec un Minitel étaient appelés des services Télétel. C'étaient en effet des passerelles vers le réseau Télétel, basé sur Transpac, qui permettait de mettre en relation les Minitels avec les serveurs des prestataires de service.

En marge de ces services Télétel, il était tout à fait possible de composer des numéros classiques à 8 (puis 10) chiffres, que ce soit pour se connecter à un autre Minitel " retourné ", ou pour accéder à des serveurs " RTC " directement connectés sur le réseau téléphonique commuté, donc non surtaxés. Une communauté de passionnés (certains diront " underground ") fréquentait ainsi régulièrement ces serveurs Minitel similaires (en plus accessibles) aux serveurs BBS qui se développaient aux États-Unis (et en France). À l'échelle locale, des collectivités proposaient également de tels serveurs Minitel à accès directs.

Technique

Le Minitel est un terminal informatique passif, c'est-à-dire qu'il s'agit uniquement d'un clavier et d'un écran, sans processeur ni dispositif de stockage. Les services sont accessibles depuis une ligne de téléphone grâce au modem incorporé (1200 bit/s en réception, 75 bit/s en émission). Le Minitel était muni de prises en T pour la connexion au réseau téléphonique de France Télécom.

L'écran du Minitel est une matrice texte d'une taille de 40 colonnes en mode Vidéotex (8 nuances de gris) et se base sur un système d'encodage qui lui est propre. Cela lui permet d'afficher des images en mode texte, à la manière de l'Art ASCII.

Xtel : logiciel émulateur de terminal Minitel
Xtel : logiciel émulateur de terminal Minitel

Caracteristiques du Minitel 1B

  • Modem V.23 (1200 bit/s en réception - 75 bit/s en émission) " retournable ", E71 intégré.
  • Affichage Videotex en 40 colonnes et 8 couleurs (alpha-mosaïque) et mode téléinformatique 80 colonnes type VT100.
  • Raccourci-claviers pour accéder à des modes avancés.
  • Transmission par voie série entre un micro et le Minitel jusqu'à 4800 bits/s (9600 bit/s sur Minitel 2).

Anecdotes

Les premiers modèles ont été livrés avec un clavier alphabétique (ABCDEF) déroutant pour les habitués des claviers normalisés des machines à écrire ou des terminaux informatiques en AZERTY ou QWERTY, sans arranger réellement les non familiers des claviers. Ils ont été vite abandonnés au profit de la norme AZERTY.

Les premiers modèles ne permettaient pas de garder à l'écran la mémoire de la dernière page consultée quand on se déconnectait du service consulté en ligne. Deux solutions s'opposaient : payer pour garder cette page à l'écran, ou placer un boitier de mémoire entre la ligne et le Minitel. Ces deux solutions étant coûteuses, la solution vint de petits malins ayant trouvé qu'il suffisait de débrancher la prise téléphonique sans appuyer sur Fin de Connexion.

Au sein même de l'équipe de création du premier Minitel, la majorité était favorable à la technique du terminal passif, finalement adoptée. D'autres défendaient l'idée d'équiper le Minitel avec un processeur d'un bus, ouvrant la possibilité de cartes d'extension et un système d'exploitation. Les partisans de cette option, rétrospectivement astucieuse, n'ont pas obtenu gain de cause, principalement pour des raisons de prix de revient.

Pourtant, il a été exposé pendant quelques semaines à la Fnac, magasin parisien de vente de matériel électronique, un curieux hybride qui intégrait l'un des premiers micro-ordinateurs, le Sinclair ZX81, dans un Minitel. Ainsi était réalisé le mariage du clavier écran modem sans processeur (le Minitel) avec le micro-ordinateur sans écran (le Sinclair). Pour trouver un micro-ordinateur communicant à cette époque, il faut se tourner vers le SMT Goupil G1, équipé d'un modem acoustique.

Sur les premiers modèles de Minitel 10 (équipés d'un téléphone), la touche permettant de composer sans décrocher n'était pas une touche ordinaire, mais exerçait une pression sur le contact de détection du combiné au travers d'une tringle munie d'un ressort (ce qui lui donnait un touché très particulier).

Le minitel de base ne comportait pas de numéroteur (il fallait numéroter sur le téléphone et appuyer sur "Connexion/fin"). Néanmoins comme il était également muni d'une prise péri-informatique (une simple liaison série), certains programmeurs arrivèrent à le faire numéroter en envoyant des séries de décrocher/raccrocher simulant la numérotation par impulsion. C'était la procédure takatakata.

Les Minitels

Les caractéristiques techniques des Minitels étaient décrites dans des ouvrages de référence intitulés " STUM " (Spécifications Techniques d'Utilisation du Minitel), qui se déclinaient par modèle (STUM 1, STUM 1B, STUM 10 etc.). Elles étaient disponibles initalement auprès du CNET puis de France Telecom.

En dépit de normes détaillées, il existait de légères différences entre modèles, et surtout entre fabricants. Il était possible d' " interroger le minitel " pour récupérer le modèle exact et, éventuellement, adapter le service.

  • Minitel 1 standard : Fonctionne en standard ASCII qui permet le dialogue avec des banques de données internationales. L'affichage est en 8 nuances de gris (noir et blanc y compris).
  • Minitel 1 couleur : Les 8 nuances de gris sont converties en couleurs :

Noir, Rouge, Vert, Jaune, Bleu, Magenta, Cyan, Blanc (selon l'ordre des codes employés) Noir, Bleu, Rouge, Magenta, Vert, Cyan, Jaune, Blanc (selon l'intensité de gris)

  • Minitel 1 dialogue : Permet au détenteur de ce terminal d'échanger par Minitel des textes en direct avec un correspondant utilisant un minitel de n'importe quel modèle.
  • Minitel 1B : Son clavier est équipé de nouvelles touches, dont Fnct et Ctrl. Il permet un affichage en 80 colonnes. Certaines fonctions d'affichage font leur apparition comme " inserer ligne ", " supprimer ligne ". Le "B" signifie Bistandard car il pouvait également "retourner" son modem afin d'émettre à 1200 bit/s et recevoir à 75 bit/s, permettant ainsi de se connecter à d'autres Minitels.
  • Minitel 2 : Permet à l'utilisateur de protéger, par un mot de passe, l'accès à son terminal. Le minitel 2 dispose en outre d'une fonction répertoire. (possibilité de pré-enregistrer jusqu'à 10 numéros.) Il permet aussi un affichage graphique plus évolué en permettant de redéfinir les caractères (DRCS, Dynamical Redefinable Character Set, en français JCDR, Jeu de Caractères Re Définissable). Cette fonction est peu utilisée car elle est lente et que le parc de minitel-2 n'a jamais été assez étendu.
  • Minitel 10 : Cumule les fonctions du Minitel et d'un téléphone sophistiqué. Il existe aussi une version bistandard (10b).
  • Minitel 12 : Répondeur télématique capable de prendre une communication, d'afficher une page d'accueil et d'enregistrer le message écrit laissé par le correspondant.
  • Minitel 5 : Minitel portatif à cristaux liquides qui a les mêmes fonctions que le minitel 10 bistandard, combiné téléphonique en moins.
  • Minitel "Photo" ou Magis Club : Minitel pouvant afficher des images au format JPEG en 64 niveaux de gris. Son modem peut se connecter à 9600 bit/s. Ce mode est souvent appelé TVR, pour Télétel Vitesse Rapide. Quelques services (de mémoire: "3623 AFP-Photo") ont été spécifiquement créés pour cette version de Minitel, qui sait aussi gérer le DRCS et le mode bistandard, et inclut même un lecteur de carte à puce.

i-minitel

i-minitel est un navigateur pour PC qui permet à l'utilisateur d'accéder à des services Minitel sur l'internet avec une connexion bas débit ou haut débit, mais le service n'est pas disponible hors de la France métropolitaine ni à l'étranger, parce qu'il faut avoir une ligne fixe France Télécom.

Citation autour du Minitel

" On nous dit que le monde entier nous envie le Minitel. Je ne sais pas s'il nous l'envie, messieurs, mais je peux en tout cas vous dire une chose avec certitude, c'est qu'il ne nous l'achète pas " Bruno Lussato, professeur à l'ENSAM (Arts et Métiers), 1988.

Passage à Internet des utilisateurs

Les utilisateurs habitués au Minitel peuvent avoir des difficultés à passer à Internet.

  • Avantages d'Internet
    1. Images
    2. Système ouvert
    3. Ergonomique (polices typographiques, personnalisation du navigateur)
    4. non sur-surfacturé (paiement simple)
    5. Beaucoup plus d'informations disponibles
    6. Pas de monopole d'un opérateur unique
  • Inconvénients d'Internet
    1. Plus grand débit d'information, ce qui implique soit ligne à haut débit, soit lenteur.
    2. Pas de structure normalisée, ni d'annuaire officiel (bien qu'avec les pages jaunes ou 411 en ligne et les moteurs de recherche (Google par exemple) on n'en ait guère besoin).
    3. Nécessite d'avoir un ordinateur (ou une console de jeu communicante branchée sur la télévision), et d'attendre qu'il ait démarré. Cependant, des terminaux légers existent, les Webphones, qui sont opérationnels dès leur mise sous tension, exactement comme un Minitel. Malheureusement, ils ne sont généralement pas capables de faire fonctionner les nouveaux services dits " Web 2.0 ".
    4. Manque éventuel de sécurité : le Minitel passe par un réseau " sécurisé " qui est Transpac, alors qu'Internet n'a pas de chemin prédéfini peut passer par certains sites éventuellement malveillants.

En tout état de cause, les experts s'accordent à dire qu'avec la sortie et le déploiement du Minitel, la France avait de nombreuses années d'avance en matière d’échanges électroniques, mais que cela a, hélas, considérablement freiné le développement d'Internet en France qui, par la suite, accusait alors des années de retard[1]

Des passerelles Minitel/Internet furent néanmoins conçues et mises en place dès le début des années 1990. Ces passerelles utilisaient le mode 80 colonnes du minitel et permettaient à l'usager de disposer des services USENET (e-mail et newsgroup). Les plus célèbres services de ce type furent le 3614 Teaser réalisé par Jean-Claude Michot et Jean-René Vidaud (France-Teaser) ainsi que le 3615 Internet de Valentin Lacambre (Altern).

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