L’empreinte écologique vise à traduire de manière facilement compréhensible l’impact d’activités humaines sur les écosystèmes et la planète. Elle se mesure généralement en surface (hectares par individu, ou hectares consommés par une ville ou un pays pour répondre à ses besoins, par exemple). Cette surface traduit, grâce à un système de conversion une quantité de ressources nécessaires par système opérant.
Plus précisément, l'empreinte écologique quantifie pour un individu ou une population la surface bioproductive nécessaire pour produire les principales ressources consommées par cette population et pour absorber ses déchets. L'empreinte écologique peut aussi être utilisée pour donner une mesure des impacts d'activités de production comme l'élevage ou l'extraction d'or ou d'objets tels qu'une voiture, un ordinateur ou un téléphone portable[1].
Ceci permet de comparer l'empreinte d'une entité par rapport à la surface bioproductive locale ou planétaire estimée disponible ou de mesurer s’il augmente ou diminue si l’on dispose de séries de données de base.
Plusieurs définitions de ce concept récent circulent, toutes basées sur la conversion en équivalent-surface (hectares) des besoins nécessaires à un individu ou à un groupe ou à la fabrication d’un objet ou à la production d’un service. Cette "surface" métaphorique est virtuelle, mais elle traduit une réalité très concrète. Chacun comprend intuitivement que dans un monde fini où la population croît, plus cette "empreinte" est large, plus on s’éloigne de l’idéal de soutenabilité et durabilité du développement. (Autrement dit, métaphoriquement, plus l'entité est "lourde", plus son empreinte sera profonde et moins réversible sur la planète, surtout si la surface dont elle dispose est petite).
L’empreinte écologique donne à chacun et à tous une idée la part de surface planétaire qu’on utilise pour vivre ou survivre. Elle traduit une analyse qualitative globale simplifiée des impacts, en un indice quantitatif cohérent avec son objectif et facilement compréhensible pour tous, quelle que soit la langue, l’âge ou la culture, ce qui lui confère un caractère assez universel. Chacun peut ainsi calculer son empreinte écologique et chercher à la diminuer.
Cet indice simple, immédiatement opérant et très pédagogique n'a pas la prétention de tout décrire. Il annonce même qu'il sous-estime certains impacts (fragmentation, pollution et dégradation qualitative des écosystèmes, agrosystèmes et sylvosystèmes, production de toxiques, impacts sur la biodiversité, risques nouveaux liés au nucléaire ou aux biotechnologies… qui peuvent néanmoins être calculés par ailleurs et intégré dans un calcul affiné de l'empreinte.)
Le Pr Colin Fudge propose une définition simple : " l'empreinte écologique est " la superficie géographique nécessaire pour subvenir aux besoins d'une ville et absorber ses déchets ". Pour William E. Rees , un des pères de ce concept: " l'empreinte écologique est la surface correspondante de terre productive et d'écosystèmes aquatiques nécessaires pour la production des ressources utilisées et l'assimilation des déchets produits par une population définie à un niveau de vie spécifié, là où cette terre se trouve sur la planète ". Pour l’OCDE il s'agit de la "mesure en hectares de la superficie biologiquement productive nécessaire pour pourvoir aux besoins d’une population humaine de taille donnée ". D’autres auteurs proposent de mesurer la quantité mais aussi la qualité des ressources écologiques nécessaires pour subvenir aux besoins d'une entité ou population donnée, à un niveau donné de consommation et de technologie.
Par extension, on peut calculer l'empreinte d'un objet (un ordinateur, une voiture, un meuble en bois exotique) en considérant la surface moyenne liée aux ressources nécessaire à l'extraction et au transport des matériaux, à sa fabrication, son fonctionnement et son élimination. Par exemple, les empreintes d’un téléphone portable et d'un ordinateur PC en l'an 2000 étaient estimées respectivement à 0,6 (vieux modèles) à 0,4 % (modèles récents) de la surface terrestre bioproductive nécessaire per capita. Un ordinateur PC en consommait 9 %.
Le terme d'empreinte écologique s’inscrit dans la dynamique du Club de Rome, de Rio et apparaît en 1992 dans un article "Ecological footprints and appropriated carrying capacity: what urban economics leaves out"[2] écrit par le Professeur William Rees de l'Université de Colombie Britannique. En 1995, le Pr. Rees et Matis Wackernagel en affinent le concept et la méthode de calcul dans un livre intitulé "Our Ecological Footprint: Reducing Human Impact on the Earth". Des logiciels dits " calculateurs " ont ensuite été produits et affinés pour mesurer des empreintes écologiques à diverses échelles, sur la base de données publiées et comparables. Cet indice a connu un succès croissant à partir de la fin des années 1990. Le WWF a fortement contribué à le populariser, avec en France l'association 4D, puis Agora 21, quelques collectivités (Conseil Régional Nord pas de Calais, Ville de Paris, puis certains conseils généraux (Conseil Général du Nord), encouragés par la DATAR qui le cite en exemple de bonne pratique mais sans cependant l'utiliser. Il est calculé et publié annuellement par l'association WWF, depuis 1999. La notion d'empreinte écologique a été diffusée au Sommet de Johannesburg par WWF en 2002. Cet indicateur est considéré comme un moyen de communication destiné aux grand public.
L’empreine écologique tire aussi son inspiration des approches géobiophysiologiques de la biosphère et de l'Ecologie du XXème siècle qui ont contribué à la notion unifiante de "sustanability" (soutenabilité du développement) et aux concept économique d'’internalisation des coûts externes (environnementaux et sociaux). La boite à outil de l’empreinte écologique dérive aussi des approches " Etude d’impact " et "Mesures conservatoires et compensatoires " qu’elle contribue à grandement rénover, avec d’autres outils tels que le Bilan carbone ou le Profil environnemental : L’empreinte écologique mesure notamment l’énorme insuffisance des mesures classiques de compensation, l’insuffisance des champs couverts par l’obligation d’étude d’impact, et la pressante nécessité qu’il y aurait à développer des mesures compensatoires écologiquement efficientes et fonctionnelles, en intégrant la notion de dette écologique.
W. Rees a proposé un premier un mode de calcul simplifié basé sur la somme mathématique des surfaces bioproductives suivantes :
Ce calcul produit une " empreinte " traduite en équivalent-hectares bioproductifs consommés, mettant clairement en évidence le lien entre population, modes de développement (plus ou moins consommateurs de ressources) et soutenabilité du développement. Rapporté à l'individu, au quartier, à la ville ou à un pays (ou objet, ou service), et analysé, le calcul plus détaillé met en exergue, de manière pédagogique, les points sur lesquels agir en priorité, tant pour l'individu que pour une collectivité.
Le calcul peut encore être précisé en ajoutant aux superficies biologiquement productives nécessaires pour produire les aliments animaux et végétaux, le bois et produits dérivés,
Plus tard, le calcul pourrait éventuellement intégrer certaines dégradations écologiques et sanitaires secondaires liées par exemple :
Elle se calcule comme le produit de la superficie 'utile' (bioproductive) de la Planète par le rapport entre des estimations pondérées en fonction de facteurs choisis de la consommation des ressources d'un groupe et une estimation pondérée de manière identique de la fourniture maximale de ressource de la Terre. Les facteurs choisis appartiennent à 3 grandes familles :
L’importance relative de ces facteurs varie selon le niveau de développement, de richesse et le contexte géoclimatique, mais l’idée centrale est ici que chaque activité en soutenant le développement de son écosystème mesure et comprenne son propre développement, en intégrant l’évidence que pour que la vie humaine ou le développement soient durables, sûres et possibles, il convient de limiter au maximum les impacts négatifs de nos activités (empreinte écologique > 1) et de maximiser les impacts positifs envers l'écosystème (empreinte écologique neutre ou <1). Cette approche peut aussi introduire l’idée de nécessité de remboursement solidaire de la dette écologique, ou de décroissance soutenable.
Ils varient avec l’augmentation de la population, les modes de développement, et le niveau moyen de vie. Mais on sait qu’en considérant la superficie totale de la terre quand elle accueillait 6 milliards de personnes, chacune disposait de 8,5 ha, à partager avec la faune et la flore qui ont également des besoins incompressibles, pour notamment produire l'oxygène qui nous est vital. De ceci, il faut extraire les terres improductives (glaciers, sommets, déserts..). Il ne reste alors que 2 ha utilisables par personne. Une estimation tenant compte des besoins minimaux des autres espèces en eau, air, habitats et nutriments attribue finalement, en moyenne et théoriquement, 1,5 ha à chaque personne (pour 6 milliards de personnes).
Or, un terrien moyen a aujourd’hui besoin de 2,5 ha. L'empreinte écologique mondiale a donc dépassé la capacité biologique de la Terre à produire nos ressources et absorber nos déchets depuis le milieu des années 1970, ce qui signifie que l'on surconsomme déjà les réserves, en réalité en surexploitant les milieux et grâce aux ressources fossiles. Or ceci contribue au réchauffement climatique, et donc au risque d’une rapide montée des océans qui diminuera encore la surface de terre disponible. La tendance à l'augmentation n'a pas encore pu être inversée, en raison de la difficulté de changer les modes de consommation et de production, en dépit des engagements et objectifs de développement durable établis aux sommets de la Terre de Rio de Janeiro en 1992 et de Johannesburg en 2002.
Quelques repères pour le début des années 2000
d'après Living Planet Report
Continent | Pays | |||
---|---|---|---|---|
Amérique du Nord | 9,4 hectare | Émirats arabes unis | 11,9 hectare | |
Union Européenne | 4,8 hectare | USA | 9,6 hectare | |
Europe (hors UE) | 3,8 hectare | Belgique & Luxembourg | 5,6 hectare | |
Moyenne pour un terrien | 2,23 hectare | Pays-Bas | 4,4 hectare | |
Moyen Orient et Asie centrale | 2,2 hectare | Hongrie | 3,5 hectare | |
Amérique Latine et Caraïbe | 2,0 hectare | Turquie | 2,1 hectare | |
Empreinte écologique disponible | 1,8 hectare | Brésil | 2,1 hectare | |
Asie(et Océanie) | 1,3 hectare | Algérie | 1,6 hectare | |
Afrique | 1,1 hectare | Chine | 1,6 hectare | |
Kénia | 0,8 hectare | |||
Inde | 0,8 hectare |
Dès lors que les données de bases sont disponibles, l’empreinte écologique permet à tous et à chacun, de manière transparente de :
L'empreinte écologique est très liée à l'utilisation des énergies fossiles, mais pas seulement.
Au niveau des biocarburants, certains, notamment l'éthanol, ont une forte empreinte écologique, soit directe (déforestation au Brésil, déplacements de productions alimentaires dans d'autres pays) soit indirecte (forte consommation de dérivés pétroliers pour produire de l'éthanol dans les pays tempérés).
Contrairement aux apparences, l'énergie nucléaire a aussi une empreinte écologique non négligeable, en raison de certains défauts de cette filière par rapport aux principes de responsabilité sociale des entreprises (RSE) : déchets nucléaires, nécessité de détruire les centrales au bout de quelques décennies et de retraiter les énormes quantités de déchets correspondants, cycle ouvert, risques de prolifération.
Les experts donnent des estimations d'empreinte écologique par type d'énergie.
En ce qui concerne les énergies fossiles, et plus particulièrement le pétrole, les études de prospective initiées il y a quelques années en Suède sur le pic pétrolier ( " peak oil " en anglais) cherchent à définir des stratégies innovantes. Le pic de consommation du pétrole devrait intervenir entre 2015 et 2025 (selon les experts).
Pour l’instant, l’électricité n’est pas prise en compte par les calculateurs, faute de consensus entre expert, mais cette question est à l’étude.