Un glacier est une masse de glace plus ou moins étendue qui se forme par le tassement de couches de neige accumulées. Écrasée sous son propre poids, la neige expulse l'air qu'elle contient, se soude en une masse compacte et se transforme en glace.
Le domaine de plasticité de la glace étant particulièrement étendu, un glacier s'écoule lentement sous l'effet de la gravité le long d'une pente ou par fluage.
" Glacier " est un terme francoprovençal que l'on rencontre dès le XIVe siècle en Valais et qui dérive du bas latin glacia ou du latin classique glacies. À partir du milieu du XVIIIe siècle, en France, on le préfère au terme " glacière " qui était alors utilisé.
Les glaciers représentent 98,5% des eaux douces de la planète.
Tout comme chaque rivière est unique par ses caractéristiques, aucun glacier ne ressemble à un autre. Il est cependant possible de distinguer certaines caractéristiques récurrentes et s'appliquant de manière générale.
On peut distinguer trois zones dans un glacier :
La ligne d'équilibre d'un glacier est la limite qui sépare la zone du glacier où le bilan en masse est excédentaire et la zone du glacier où le bilan en masse est déficitaire. Cette ligne d'équilibre est matérialisée durant les mois chauds par la limite entre neige persistante (les neiges éternelles) et glace apparente. La ligne d'équilibre est utilisée pour marquer la fin de la zone d'accumulation d'un glacier.
Ces trois secteurs d'un glacier sont très variables en taille, voire absents sur certains glaciers.
Les couches successives de neige qui forment le glacier emprisonnent durant leur passage dans l'atmosphère poussières, pollens, polluants et piègent des bulles d'air qui conservent la teneur des gaz composant l'atmosphère à l'époque de piégeage. Ces informations font d'un glacier un véritable livre relatant l'évolution de l'atmosphère durant des centaines de milliers d'années. Des forages (Vostok en Antarctique) permettent de remonter des carottes de glace et d'analyser la composition de l'atmosphère à l'époque de la formation des strates.
Plus une glace est sombre, moins elle contient de bulle d'air.
Un glacier possède d'autres caractéristiques qui sont révélatrices de la topographie, du climat, de son activité érosive, de son passé :
On peut définir un bilan hydrique saisonnier pour un glacier.
Ce bilan fait la différence entre perte et gain d'eau, qu'elle soit sous forme liquide, solide ou gazeuse. Durant les mois les plus chauds, les précipitations sous forme de neige sont au plus bas et la remontée des températures accélère la fonte du glacier en étendant sa zone d'ablation à plus haute altitude. Le bilan hydrique du glacier est alors négatif : sa masse diminue en perdant plus d'eau qu'il n'en reçoit. À l'inverse, les mois les plus froids voient les précipitations neigeuses augmenter et la fonte atteindre son minimum. Le bilan hydrique du glacier est positif : sa masse augmente en reconstituant ses stocks de glace qu'il a perdu l'été.
Le bilan hydrique saisonnier d'un glacier défini le débit du torrent émissaire dont le flot est composé des eaux de fonte. Le débit des eaux de fonte est à son maximum les mois les plus chauds et est à son minimum les mois les plus froids. Il faut préciser que ce débit des eaux de fonte, même s'il l'influence fortement, ne correspond pas au débit du torrent émissaire qui peut être grossi par les pluies ou atténué par l'évaporation, la recharge de la nappe phréatique, le prélèvement pour les activités humaines, etc. Le débit des eaux de fonte, s'il est directement lié aux précipitations neigeuses, est beaucoup plus affecté par d'autres facteurs météorologiques : l'intensité et la durée de l'ensoleillement et les températures qui sont des variables plus stables dans l'espace et dans le temps que les précipitations. Ainsi, on peut observer des fluctuations journalières du débit des eaux de fonte : le maximum est atteint dans l'après-midi tandis que le minimum l'est en fin de nuit.
Le glacier, en jouant le rôle de réservoir d'eau douce, régularise le débit des cours d'eau en aval tout au long de l'année. Il permet ainsi à la végétation en aval du glacier de disposer de réserves d'eau constantes et d'éviter ou d'atténuer d'éventuelles périodes de sècheresse.
Un glacier commence à se déformer et est donc capable d'avancer en acquérant une certaine plasticité lorsqu'il dépasse cinquante mètres d'épaisseur. C'est aussi pour cette raison que la surface des glaciers est couverte de séracs et de crevasses : la couche supérieure correspondant aux cinquante premiers mètres du glacier ne se déforme pas mais casse.
Un glacier avance, se déplace à cause de la gravité ou se déforme, flue à cause de son propre poids. La vitesse et la direction du déplacement sont fonction de la topographie, de la température du glacier, de sa teneur en air, de la quantité d'eau liquide qu'il contient, de la quantité et de la nature des matériaux rocheux qu'il transporte, de sa réaction face à la rencontre avec d'autres glaciers,...
En général, plus la pente est forte et régulière, le glacier lourd, ayant une température élevée et contenant de l'eau liquide, de l'air et peu de grosses roches, plus il ira vite et réciproquement.
Le fait qu'un glacier soit recouvert ou non d'une couche de débris rocheux peut influencer sa vitesse d'écoulement par le biais des eaux de fonte. Ces eaux de fonte, en s'écoulant entre le glacier et les parois rocheuses, lubrifie la glace qui glisse mieux contre la roche. En comportant des débris rocheux à sa surface, un glacier s'isole des rayonnements solaires et des températures atmosphériques, diminuant par là même la fonte de la glace à sa surface. Disposant de moins d'eau liquide, le glacier avance moins vite que si sa glace était découverte.
La vitesse d'écoulement n'est pas la même en tout point d'un glacier. Elle varie selon la distance avec les parois et selon qu'on se trouve en zone d'accumulation, de transport ou d'ablation. Plus la glace est proche des parois latérales, plus sa vitesse est réduite. Dans la zone d'accumulation et de transport, la vitesse est généralement maximale dans les profondeurs du glacier, tandis qu'elle l'est à la surface du glacier dans la zone d'ablation. Cette vitesse différentielle fait que le litage des couches de neige est horizontal dans la zone d'accumulation, puis devient vertical dans le zone de transport pour redevenir horizontal dans la zone d'ablation.
Les vitesses d'écoulement d'un glacier sont très variables. La vitesse moyenne pour un glacier classique est de l'ordre de quelques centimètres à quelques dizaines de centimètres par jour. Certains glaciers (glaciers suspendus ou glaciers dits morts) ont une vitesse d'écoulement quasiment proche de zéro. D'autres glaciers (ice streams) peuvent avancer de plusieurs dizaines de mètres par jour. Ainsi, un glacier de Groenland, le Kangerdlugssuaq (ou Kangerlussuaq situé au sud de Nuuk) a multiplié sa vitesse par trois entre 1996 et 2005 et atteint à cette date de plus de quatorze kilomètres par an soit une moyenne de quarante mètres par jour[1].
Le front d'un glacier peut être amené à avancer ou à reculer dans une vallée. Ces mouvements sont le résultat d'un déséquilibre entre apport de neige et fonte : lorsque le bilan hydrique annuel est négatif, le glacier entre dans une phase de recul et réciproquement.
Il faut rappeler que quand on parle d'un recul glaciaire, ce n'est pas le glacier qui recule, la glace continuant d'avancer vers la bas de la vallée, c'est la position du front glaciaire qui se déplace vers le haut de la vallée.
Si l'apport de neige, et par conséquent de glace, est plus important que la fonte du front glaciaire, le glacier progressera dans la vallée. Ceci peut être provoqué par un refroidissement climatique et/ou une augmentation des précipitations. Les effets inverses seront à l'origine d'un retrait glaciaire.
Les conséquences d'un retrait ou d'une avancée glaciaire dans la morphologie d'un glacier peuvent être spectaculaires et radicales :
Certaines progressions d'un glacier sont révélatrices d'une mauvaise santé du glacier et s'apparentent plus à un suicide qu'à une croissance. Il s'agit des surges glaciaires.
Attention aussi à ne pas confondre progression glaciaire et jökulhlaup qui sont des inondations provoquées par une vidange d'un lac intraglaciaire formé au cours d'une éruption volcanique.
Quant à la tendance actuelle, et contrairement à la croyance en vogue, les mesures[2],[3],[4],[5] effectuées depuis cinquante ans ne permettent pas d'induire une tendance dans un sens ou dans l'autre : la taille des grands glaciers semble croître depuis vingt-cinq ans, alors que celle de certains petits glaciers semble diminuer.
Exemples de progression de glaciers[6] :
Exemples de régressions de glaciers :
Des ingénieurs tentent depuis quelques années de mettre au point des techniques pour ralentir ou stopper la fonte des glaciers, voire de leur faire regagner de la masse. Ainsi, une technique expérimentale consistait, à l'aide de nombreux forages dans la glace, à injecter de l'eau dans un glacier suisse qui était utilisé pour le ski d'été. Cette eau devait permettre au glacier de regagner de la masse en descendant moins vite dans la vallée. La technique, trop chère et pas assez efficace, a été abandonnée. En 2005, la station de ski d'Andermatt en Suisse a emballé une partie d'un glacier dans des bandes de mousse en PVC. Selon les résultats obtenu, la surface recouverte sera étendue par la suite[12]. Bien qu'elles puissent produire des résultats encourageants, ces techniques ne résolvent pas la source du problème et ne font que retarder l'échéance d'une disparition de ces glaciers.
Les glaciers peuvent provoquer de nombreuses catastrophes liées à leur nature (eau solide et liquide), leurs caractéristiques (présence de séracs, de crevasses, etc) et leur capacité (surge glaciaire, barrage, etc).
Les glaciers peuvent provoquer :
Il existe une multitude de petits glaciers à travers le monde qui s'apparentent plus à de gros névés compactés qu'à de vrais glaciers.
Le plus long glacier du monde est le glacier Beardmore en Antarctique avec plus de 160 kilomètres de long.
Le plus grand inlandsis est celui de l'Antarctique avec 13 586 000 km2. C'est également le plus épais avec un maximum de 4 700 mètres d'épaisseur. Celui du Groenland fait quant à lui 1 700 000 km2 avec un maximum de 3 000 mètres d'épaisseur.
La plus grande calotte glaciaire est celle du Austfonna (Svalbard) avec 8 200 km2. Celle du Vatnajökull en Islande atteint 8 100 km2 et mille mètres d'épaisseur.
Le plus grand glacier de piémont est le glacier Malaspina en Alaska avec un lobe glaciaire de 3 900 km2.
Le plus grand glacier de vallée des Alpes est le glacier d'Aletsch (Suisse) avec 23,6 kilomètres de long (2002).
Le plus grand glacier français est le glacier Cook (Kerguelen).
Le plus long glacier français de métropole est la Mer de Glace dans le massif du Mont-Blanc.
Il s'agit de glaciers dont la morphologie est dépendante du relief. Ils se trouvent en général en montagne et occupent le fond des talwegs.
Les glaciers de vallée sont la représentation classique que l'on se fait d'un glacier : un bassin d'alimentation en forme de cirque au pieds de pics dépassant de la neige, une masse de glace allongée occupant toute la largeur d'une vallée et un front glaciaire donnant naissance à un torrent.
Un glacier de vallée peut se former à partir d'une seule zone d'accumulation ou de plusieurs. Il peut également recevoir des masses de glaces qui proviennent de glaciers adjacents et venant grossir le flot de glace.
Exemples de glacier de vallée :
Un glacier suspendu est généralement de petite taille et est perché sur les flancs d'une montagne. Il n'est composé que d'une zone d'accumulation, parfois une courte zone de transport mais très rarement d'une zone d'ablation. La glace est évacuée par sublimation ou par chute de séracs, séracs qui peuvent donner naissance à un glacier régénéré en contre-bas.
Exemples de glaciers suspendus :
Il s'agit d'un glacier dont les apports en neige sont fournis par des chutes de séracs provenant d'un glacier suspendu. Un glacier suspendu étant en général de faible superficie, les apports en neige sont limités et les glaciers régénérés sont souvent petits et ne parviennent pas à former des glaciers de vallée. Leur glace s'évacue par la sublimation ou la fonte. Le glacier régénéré est en quelque sorte la zone d'ablation d'un glacier suspendu.
Exemples de glaciers régénérés :
Un glacier de cirque est un glacier qui occupe la totalité d'un cirque et ne le quittant pas ou très peu. Il s'agit en fait de la partie correspondant à la zone d'accumulation d'un glacier de vallée. Il possède une zone d'accumulation, une zone de transport réduite et une zone d'ablation.
Exemple de glaciers de cirque :
Il s'agit d'un glacier de vallée qui atteint la plaine au pied de la chaine de montagne. Il possède une zone d'accumulation et une zone de transport classique mais sa zone d'ablation s'étale dans la plaine soit en digitations, soit en un lobe glaciaire plus ou moins étendu. Devant le lobe glaciaire peut se former un sandur, lieu propice à l'installation de formations glaciaires et péri-glaciaires : drumlins, eskers, kames, kettles, blocs erratiques, moraines,...
Exemple de glaciers de piémont :
Un glacier dont l'une des langues rejoint la mer ou l'océan est généralement qualifié de côtier. Ces situations ne se rencontrent qu'en des latitudes élevées, un tel glacier requérant une température annuelle moyenne atmosphérique au niveau de la mer approchant la température de glaciation. On en rencontre en Norvège et en Alaska où ils se jettent dans des fjords.
Exemple de glaciers côtiers :
Ce sont des glaciers qui possèdent certaines caractéristiques des inlandsis : une grande superficie, une forme aléatoire, une grande épaisseur, une pente relativement faible du substrat rocheux, une évacuation de la glace par de larges fronts glaciaires et/ou par des émissions de glaciers. Il s'agit en fait de mini-inlandsis souvent perchés au sommet de montagnes ou de volcans et en partie confinés par les sommets qui composent la montagne. Ce sont bien souvent des reliquats des grandes calottes polaires des anciennes glaciations.
Exemple de calottes locales :
Leur étendue et leur épaisseur sont tellement importantes que le relief a peu d'incidence sur leur morphologie. Ils se présentent sous la forme d'un immense amas de glace au sommet formant un plateau peu pentu percé de temps à autre par un nunatak, s'écoulant de toute part en produisant des lobes glaciaires, des digitations et des ice streams.
Leur étendue est inférieure à 50 000 km².
Exemples de calottes glaciaires :
Leur étendue est supérieure à 50 000 km2.
Il n'existe que deux inlandsis au monde :
En plus de la morphologie, on peut classer les glaciers suivant leur température. Celle-ci est évidemment fonction de l'altitude et de la latitude du glacier mais aussi de la présence ou non d'activité volcanique sous le glacier.
Pour qu'un glacier se constitue ou se maintienne, il faut que l'apport de neige excède ou équilibre la perte de glace due à la fonte, à la sublimation et au glissement de la masse d'eau gelée vers l'aval. L'altitude minimale pour l'obtention des conditions nécessaires à la formation d'un glacier varient selon le climat et la latitude d'une région.
Si elle se situe quasiment au niveau de la mer au pôles, elle se trouve en revanche entre 2 700 et 3 500 mètres d'altitude[13] dans les Alpes et au-delà sous les tropiques (l'altitude limite reste très difficile à déterminer actuellement en raison du réchauffement climatique).
Les glaciers laissent de nombreuses traces de leurs passages dans le paysage sous forme de dépôts de toute sorte :
Les glaciers, de par leur poids, les roches qu'ils contiennent, les eaux de fonte qu'ils produisent, la nature et la dureté du substrat sur lequel ils évoluent ainsi que de leur grande capacité de transport érodent et modèlent le paysage en laissant des formes caractéristiques de leur passage :
Les glaciers constituent un attrait touristique indéniable. De nombreuses personnes se déplacent vers les glaciers pour :
Il existe des glaciers sur d'autres planètes :