France | |
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Noms : | France (1960) Norway (1979) Blue Lady (2006) |
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Type : | Paquebot transatlantique |
Histoire | |
Quille posée : | 7 octobre 1957 |
Lancement : | 11 mai 1960 |
En service : | 19 janvier 1962 |
Statut : | Désarmé, démolition possible |
Caractéristiques techniques | |
Longueur : | 315,66 m (hors-tout) 299,25 m (flottaison) 290,00 m (entre perp.) |
Maître-bau : | 33,70 m |
Tirant d'eau : | 10,48 m |
Tirant d'air : | 66,90 m |
Déplacement : | 57 607 t |
Port en lourd : | 13 960 tpl |
Tonnage : | 66 348 tjb |
Propulsion : | 4 hélices fixes, ∅5,8 m 4 groupes CEM-Parsons |
Puissance : | 160 000 CV |
Vitesse : | 31 nœuds |
Ponts : | 12 |
Autres caractéristiques | |
Passagers : | 2032 |
Équipage : | 1100 |
Chantier : | Chantiers de l'Atlantique |
Armateur : | Norwegian Cruise Line |
Affréteur : | Star Cruises |
Pavillon : | Bahamas |
Coût : | 420 millions de FF (1962) |
Le France, ensuite rebaptisé Norway (1979), puis Blue Lady (2006), est un paquebot transatlantique construit aux Chantiers de l'Atlantique à Saint-Nazaire où il est mis à l'eau, le 11 mai 1960, en présence du Général De Gaulle qui fera un vibrant discours. Son port d'attache est alors le Havre et il est mis en service en janvier 1962 pour le compte de la Compagnie Générale Transatlantique. Luxueusement meublé, le paquebot a été décoré par plusieurs peintres de l'Ecole de Paris et notamment par Louis Vuillermoz. Il assurera des traversées transatlantique et quelques croisières autour du monde jusqu'en 1974 où il est désarmé pour raisons économiques. Revendu à un armateur norvégien en 1979 et rebaptisé Norway, il assure alors, après plusieurs transformations, des croisières en mer des Caraïbes. Revendu, il est rebaptisé Blue Lady en 2006 et est actuellement (mars 2007) en attente de démolition à Alang en Inde.
Le navire est conçu pour être le plus long paquebot à son époque. Ceci se justifie par la volonté d'atteindre la vitesse de 31 nœuds, permettant de traverser l'Atlantique en cinq jours et de rentabiliser le navire.
Le France est construit aux Chantiers de l'Atlantique ; la première tôle de la quille est posée le 7 octobre 1957 sur la cale no 1 de Penhoët, là où avait été construit le Normandie. Les services techniques du chantier s'étaient intéressés dès 1935 à la construction d'un " petit frère " du Normandie, appelé Bretagne, mais la guerre avait empêché ce projet.
Le chantier emploie 1 300 ouvriers à la construction de la coque sous la supervision d'Alfred Lafont qui contrôle la conception et l'exécution du projet, Antoine Barthélémy (ingénieur du génie maritime) et Jean-Paul Ricard, ingénieur en chef de la partie technique. La construction prendra quatre ans. 7 500 plans sont nécessaires à la construction, dont 3 295 pour la machinerie, ce à quoi s'ajoutent 42 000 croquis de préfabrication.
Les pièces proviennent de différents endroits : le gouvernail est construit par les Chantiers de la Ciotat ; les arbres d'hélice le sont aux Ateliers du Creusot ; la mèche de safran est fabriquée aux Usines Saint-Jacques à Montluçon. Le France renferme 46 kilomètres de conduits de ventilation, 100 km de tuyaux d'acier et 160 en cuivre.
La quille est entièrement posée à la mi-janvier 1958. Les éléments suivants sont préfabriqués en " bloc ", ce qui est depuis devenu la norme, chaque bloc faisant entre 30 et 80 tonnes. Les blocs sont ensuite assemblés sur la quille, puis les uns sur les autres. 6 000 tonnes de tôles sont assemblés en octobre, l'étambot prend place le 19 décembre ; 20 000 tonnes sont assemblées fin 1959. Le 24 novembre de cette année, le dernier élément de 31 tonnes est assemblé. L'assemblage est rendu plus compliqué par la dilatation due à la chaleur pendant la journée, et à l'inclinaison de la cale de lancement obligeant à corriger les angles. La peinture de la coque commence en mars 1960 et le mât-radar de 30 m est posé le 3 mai.
Le lancement a lieu le mercredi 11 mai 1960, devant une centaine de milliers de spectateurs, pour certains venus par des trains et avions spécialement affrétés pour l'occasion. Après les discours de bienvenue, le navire est béni par Mgr. Villepelet, évêque de Nantes, à 15h50. Sous la coque, des ouvriers s'activent pour enlever les dernières cales, accores et tôles qui retiennent le navire. Sur le pont, le commandant Henri Le Huédé assure la manœuvre.
Le navire est lancé à 16h15, une demi-heure avant la pleine mer afin de profiter du courant de flot (le jour a été choisi car il correspondait à un jour de la première marée avec une amplitude suffisante). Sa marraine, Yvonne de Gaulle, épouse du général, coupe le ruban qui retient la bouteille de champagne, et le France glisse sur les rampes de bois puis pénètre dans l'eau à 33 km/h. 7 minutes plus tard, six remorqueurs le prennent en charge et l'amènent vers la forme Joubert, où ensuite quatre des remorqueurs l'amènent au quai de Penhoët. À 16h30, le Général de Gaulle prononce un discours, qui s'achève par "Et maintenant, que France s'achève et s'en aille vers l'Océan pour y voguer et servir ! Vive le France, vive la France ! "
Dans la forme Joubert, l'installation de divers équipements commence, en commençant par le gouvernail de 74 tonnes et sa mèche de 29 tonnes, ainsi que les quatre arbres d'hélice de 53 tonnes chacun le 18 juillet 1960. Cela continue avec les grands locaux, le cloisonnement des ponts, les installations électriques et la ventilation.
La construction des cheminées s'achève le 11 mars 1961 par la pose des ailerons caractéristiques. Ces ailerons sont conçus pour éviter que la fumée ne se rabatte sur le pont ; l'autre solution pour éviter les retombées de suie consistait à avoir des cheminées cylindriques, hautes et étroites, ce qui ne correspondait pas avec l'esthétique du France. Les ailerons ont été conçus pour évacuer la fumée par les côtés et ont été testés en soufflerie à Poitiers. Au final, les cheminées pèsent 40 tonnes dont 19 pour les ailerons et 2 pour le chapeau ; elles mesurent 15,6 mètres de haut, 19,8 de long à la base pour 9,5 de large ; l'envergure des ailerons est de 19 mètres.
En juillet 1961, le France rentre une dernière fois en cale sèche. Les hélices fabriquées par des fonderies marseillaises y sont installées. Les hélices bâbord sont en laiton et pèsent 27 tonnes ; celles de tribord sont en alliage et pèsent 25,4 tonnes ; toutes quatre font 5,8 m de diamètre et ont été testées au bassin d'essai des carènes de Paris. La décoration intérieure est finie, et le 11 novembre 1961, les 8 000 ouvriers des Chantiers de l'Atlantique montent à bord pour admirer leur travail terminé. Le 19 novembre à 14 heures, le France quitte Saint-Nazaire pour le Havre, son port d'attache. Il effectue ses essais en mer près de Belle-Île, commandé par le commandant Croisile.
Le France comportait un certain nombre d'innovations technologiques, notamment par rapport aux paquebots de la génération précédente. Il dispose de superstructures en alliage léger d'aluminium et d'une coque presque entièrement soudée[1] lui permettant d'avoir un tirant d'eau relativement faible, 10,48 m à pleine charge. Son déplacement est de 25% inférieur à celui du Normandie bien qu'ayant des dimensions semblables. Ceci lui permet d'atteindre la vitesse de 31 nœuds.
Sa chaudière est également d'un type nouveau, de grande puissance, à haute pression (65 bars) et haute température (500°C), permettant un meilleur rendement. Ainsi, le France ne possède que huit chaudières, contre 29 pour le Normandie (fonctionnant à 28 bar et 350°C), permettant une économie de carburant estimée alors entre 40 et 50%.
Une innovation étonnante pour l'époque consiste en quatre ailerons stabilisateurs de roulis, fabriqués par la société Provence de Constructions Navales et Industrielles. Ils sont groupés par paire de chaque côté, fixés au niveau du bouchain ; lorsqu'ils ne sont pas utilisés, ils sont rentrés dans un caisson aménagé sur la coque. Les ailerons comprennent deux volets oscillant permettant d'ajuster finement la force anti-roulis.
Chaque cabine passager et équipage dispose également de l'air conditionné, alimenté par 102 conditionneurs Westinghouse, ce qui était considéré comme un luxe à l'époque.
Le France arrive au Havre le 23 novembre 1961 à 12h45. Il effectue une seconde série d'essais en mer en décembre, fait une brève escale à Southampton, puis est inauguré le 11 janvier 1962 en présence de Michel Debré, alors premier ministre, et d'autres ministres comme Valéry Giscard d'Estaing. Le soir du 13 janvier, le bal des Petits lits blancs est organisé sur le France.
Le 19 janvier 1962 à 23h, le France part pour sa croisière inaugurale avec 1 705 passagers dont Yvonne de Gaulle qui est aussi marraine du navire, les chanteurs Tino Rossi et Jean Rigaux. La croisière se rend à Santa Cruz de Ténérife aux îles Canaries, où le bateau fait escale le 22 janvier. Le 26 janvier, au large du golfe de Gascogne, il croise le paquebot Liberté qui l'avait accueilli à son arrivée au Havre ; ce dernier se rend aux chantiers de démolition de La Spezia en Italie ; il avait aussi été commandé par le commandant Croisile. Après une escale à Southampton, la croisière s'achève au Havre le 27 janvier.
à compléter
En 1974, le paquebot transatlantique est alors un moyen de transport dépassé depuis près de 20 ans, le nombre de passagers ne cessant de chuter. En 1965, les recettes dégagées par le navire étaient pour la première fois inférieures aux dépenses, ce qui est accentué par les évènements de mai 1968 qui entraînent des augmentations de charges. Le Queen Elizabeth 2 entre en service en 1969 et mène une rude concurrence ; la dévaluation du dollar en 1973 fait perdre encore plus d'argent à la Compagnie Générale Transatlantique. La hausse des prix du pétrole suite à la crise de 1973 et la baisse des subventions d'état compliquent encore la situation.
Les rumeurs de démantèlement vont ainsi bon train, notamment après son deuxième tour du monde. Il ne semble guère envisageable de le " sauver " sous sa forme actuelle.
Le suspense continue à propos d'un éventuel démantèlement du navire, alors qu'une réunion interministérielle doit se tenir en avril 1974. Georges Pompidou meurt le 2 avril, et Valéry Giscard d'Estaing, candidat à la présidence, déclare le 14 mai vouloir maintenir le navire en service. Mais la promesse est oubliée : le nouveau gouvernement de Jacques Chirac déclare le 1er juillet mettre fin à la prise en charge du déficit de la Compagnie Générale Transatlantique ; celle-ci annonce le 8 juillet que le France doit être désarmé à la fin de la saison, le 25 octobre. Les réactions sont nombreuses : des comités de soutien se forment, des pétitions sont signées, des articles paraissent.
À quai, on peut voir des manifestations de soutien ; des passagers occupent le navire à plusieurs reprises par solidarité avec l'équipage. La Transat annonce tout de même les deux dernières traversées : Le Havre - New York du 11 au 17 octobre et New York - Cannes du 18 au 25 octobre. De nombreuses places sont réservées pour ces traversées même si célébrer la fin du France au champagne est aussi vu comme une provocation.
Le 19 juillet 1974, une manifestation entraînée par Henri Krasucki (délégué national de la CGT) et André Duroméa (maire du Havre) entraîne un retard à l'appareillage de huit heures, le France ne partant qu'à 21h05.
Le mercredi 11 septembre 1974, le France approche du Havre. À 21h06, une délégation de 50 à 60 hommes d'équipage arrive à la passerelle du navire, où se trouve le commandant Christian Pettré. La délégation est emmenée par Marcel Raulin, cabinier et président du comité intersyndical du bord[2] et comprend les secrétaires des fédérations syndicales, des délégués de l'équipage, des membres du comité central d'entreprise et du comité d'établissement du Havre. La surprise est totale, malgré certains signes avant-coureurs[3].
La confusion règne vite. Les ordres donnés à la salle des machines sont contradictoires mais la vitesse est réduite en quelques minutes ; des sonneries d'alarme se déclenchent aux machines ; le pilote L'Alexandre ne peut monter à bord. D'autres mutins arrivent à la salle des machines. Marcel Raulin ordonne au commandant de diriger le France vers l'entrée du port et de mouiller entre les bouées 9 et 12 afin de bloquer l'entrée, tout en annonçant publiquement aux passagers l'opération en cours. L'opération avait pour nom de code " Amenez les oranges ". C'est la première fois qu'une mutinerie de cette ampleur a lieu dans un bateau à l'entrée du port[4].
À 23h50, le commandant s'adresse aux passagers pour les rassurer ; la délégation confirme à minuit qu'elle ne s'opposera pas au débarquement des passagers. La passerelle et la salle des machines sont évacuées. À 9h10 le 12 septembre, le ferry Viking III de Thoresen Ferries accoste et les passagers y montent par une coupée. Les remorqueurs Abeille 26, Abeille 27 et Abeille 28 transportent les bagages à terre. L'opération est terminée à 16h15 sans incident. Alors que le ferry s'éloigne, les passagers massés sur sa plage arrière entonnent " Ce n'est qu'un au revoir " puis crient " Vive le France ! "
À bord se trouvent 964 personnes. Les marins grévistes forment un " gouvernement de crise " (Raulin en est le " premier Ministre "), impriment un journal quotidien, le (la) France en rade, et tiennent un " conseil des ministres " chaque matin. Les officiers refusent de s'associer au mouvement. Les mutins réalisent vite que le commandant a mouillé le navire en-dehors du chenal afin que les navires arrivant au port du Havre puissent toujours passer, dans un souci de sécurité.
À terre, les négociations avec les syndicats mettent du temps avant de commencer. Jacques Chirac, alors premier ministre, rencontre les membres de la compagnie et confirme la fermeté : fin de l'exploitation du navire, annulation des voyages suivants, plainte contre les mutins. Un comité de défense du paquebot est créé par André Duroméa et regroupe 31 organisations du Havre ; 40 000 personnes signent une pétition adressée au Président de la République. Le gouvernement a cependant d'autres priorités à ce moment (prise d'otages à La Haye le 13, attentat à Paris le 15).
Le conflit se durcit : le maire du Havre va retrouver les mutins avec une vedette malgré le refus du sous-préfet ; une grève générale est lancée dans la marine marchande le 16 et le 17 ; les voyages restants sont officiellement annulés par la Transat le 18 ; une barge pétrolière ravitaille le France le même jour, ce qui laisse penser à un conflit durable. Le problème du ravitaillement en vivres se pose : celui-ci est refusé par la Transat, mais est effectué par un chalutier, le Saint-Joseph, qui tente d'amener 500 kg de tomates, 3 tonnes de pommes de terre et 800 kg de carottes provenant d'organisations diverses (dockers, ouvriers, Secours Populaire...). Le chalutier est bloqué mais une manifestation à la sous-préfecture pousse la Transat à accepter le ravitaillement.
La première personne à quitter le navire est un garçon d'hôtel qui se jette à l'eau, vite secouru par les bateaux du blocus. Le 23 septembre, un plan est proposé par le ministre de l'Intérieur Michel Poniatowski pour le reconvertir en paquebot de loisirs uniquement. Mais le même jour, le vent se lève, oblige à mouiller une deuxième ancre ; les vents forcissant entre force 8 et 10, le navire appareille le 24 septembre au matin et se rend à 2 milles au large de Saint-Vaast-la-Hougue, à l'abri du de la péninsule du Cotentin ; la baisse des réserves de mazout l'empêche de naviguer plus loin ou de rester dans la rade du Havre. À Saint-Vaast, un patrouilleur empêche tout bateau de s'approcher à moins de 100 mètres. Le France est alors isolé et ne peut revenir au Havre puisque deux bouées ont été mouillées à son ancien emplacement.
Alors que les défections augmentent suite à la lassitude et au découragement, les responsables syndicaux rencontrent ceux de la Compagnie Générale Maritime le 4 octobre et trouvent un accord permettant aux marins de regagner le Havre, après 23 jours de conflit. Le France quitte Saint-Vaast le 9 octobre avec 540 hommes encore à bord et arrive au Havre, quai Joannès Couvert, où moins de 800 personnes sont là pour accueillir les mutins.
Le 19 décembre 1974, le France est remorqué depuis le quai Joannès Couvert vers le canal central dans la zone industrielle du Havre par quatre remorqueurs. Le navire est amarré près des complexes pétrochimiques et restera à cet endroit pendant plus de quatre ans, endroit qui est alors surnommé le " quai de l'oubli " ou le " quai de la honte ". Le commandant Pettré débarque le 21 décembre et seuls 40 hommes restent à bord pour maintenir la chaudière pour produir le minimum de chauffage et d'éclairage nécessaire. Cet abandon signifie aussi la fin des traversées transatlantiques pour la ville du Havre et de nombreuses suppressions d'emplois, malgré les promesses de réemploi de la CGM. 2 500 emplois sont directement supprimés par le désarmement du France, quelques milliers d'autres sont menacés indirectement.
L'entretien, le gardiennage et les frais de port du navire coûtant encore 200 000 francs par mois, la dernière chaudière est arrêtée le 29 avril 1975. Six hommes restent à bord pour la veille et l'électricité vient de la terre. Le France ne sortira du quai de l'oubli qu'une fois pendant ces quatre années, le 6 mai 1975 alors qu'une tempête casse les amarres et le met en travers du chenal. Il reviendra à plusieurs reprises en tête de l'actualité : lorsque Michel Sardou écrit et interprète la chanson Le France, dont 500 000 exemplaires sont vendus en deux semaines ; le 17 octobre 1975 lorsqu'une cinquantaine de grévistes d'Atochimie montent à bord pour déployer leurs banderoles ; d'autres grèves et manifestations utiliseront le France comme symbole.
Diverses propositions plus ou moins fantaisistes apparaissent : Michel Crépeau (maire de La Rochelle propose de l'amarrer entre l'île de Ré et La Pallice pour en faire une maison de retraite pour marins ; un chirurgien parisien propose de le convertir en navire hôpital au large du Liban alors en plein guerre civile ; une suggestion d'école hôtelière itinérante apparaît même. Les propositions plus sérieuses consistent à revendre le navire à une société de loisirs et de le convertir en navire de croisière ou en hôtel flottant. Le projet le plus sérieux vient de la ville de Montréal pour les Jeux olympiques de 1976 mais échoue. En novembre 1976, le France est mis quelques semaines en cale sèche pour le débarrasser des algues et coquillages accrochés sur sa coque, puis revient à son quai.
Finalement, le France est racheté le 24 octobre 1977 par Akram Ojjeh, riche homme d'affaires saoudien, pour 80 millions de francs. S'il dit l'avoir racheté pour "le protéger des ferrailleurs", le France ne navigue toujours pas. L'armateur norvégien Knut Ulstein Kolster, propriétaire de la société Norwegian Caribbean Line négocie avec Akram Ojjeh et lui rachète le France le 25 juin 1979 pour 77 millions de francs. L'armateur annonce que la navire va être renommé Norway, qu'il naviguera mais dans une configuration pouvant accueillir plus de passagers et avec un équipage réduit et "bon marché".
Malgré diverses propositions, les chantiers navals du Havre ne remportent pas l'offre pour la transformation du navire ; le départ du Norway est annoncé pour le 15 août 1980 pour Bremerhaven. Les Havrais manifestent ce jour-là, bloquent l'écluse François 1er qui retient le remorqueur Abeille Provence ; les marins du remorqueur sont solidaires de ce mouvement. Les contestataires sont délogés par les CRS pendant la nuit mais les remorqueurs ne sortent pas. La situation s'envenime même politiquement, et l'armateur fait intervenir deux remorqueurs hollandais pour que le navire appareille le 17 août. Un coup de vent oblige le France à rester une nuit de plus.
Il part enfin le lendemain 18 août 1979 au matin, remorqué par l’Abeille Provence. L'émotion est marquée dans la foule qui observe silencieusement le départ, et par l'absence de réponse des remorqueurs aux trois coups de sirène traditionnels du paquebot.
Arrivé à Bremerhaven (Allemagne) le 22 août 1979, il entre en cale sèche aux chantiers Hapag Lloyd pour des travaux de transformation qui dureront 32 semaines. L'appareil propulsif avant est retiré, l'arrière est entièrement automatisé ; les hélices avant sont également retirées : la vitesse de croisière est ramenée à 16-18 nœuds et la consommation à 228 tonnes de fuel par jour. Trois propulseurs d'étrave sont installés ainsi que deux propulseurs transversaux arrière afin de pouvoir se passer de remorqueurs. Les ponts arrières sont agrandis, une discothèque et un casino sont ajoutés.
L'architecte naval danois Tage Wandborg revoit l'aménagement intérieur : seules quelques cabines, la bibliothèque, la salle de jeux des enfants et le salon de coiffure subsistent de l'ancien France. À l'extérieur, le Norway est repeint en bleu. Il appareille enfin le 15 avril 1980 pour des essais en mer et arrive le 2 mai à Oslo pour une escale festive, visité par la roi Olav V. Il effectue ensuite son premier voyage de Southampton à New York, alors que certaines cabines ne sont toujours pas terminées, puis rejoint Miami, son nouveau port d'attache. Il effectue durant les années suivantes des croisières d'une semaine dans les Caraïbes, embarquant 1 890 passagers pour 790 membres d'équipage.
En avril 1982, le Norway revient à Bremerhaven pour d'autres transformations : remplacement des hélices par deux nouvelles à quatre pales, ancre d'embossage, rénovation de 650 cabines et installation du téléphone par satellite. En septembre 1987, la salle des machines et le théâtre sont rénovés ; de nouvelles cabines sont installées en plus d'une boutique et des salles de conférence. La même année, les lois norvégiennes changeant, le navire passe sous pavillon des Bahamas, un pavillon de complaisance afin, entre autres, de pouvoir embaucher des marins de pays où la main d'œuvre est peu chère.
À deux reprises, le Norway est symboliquement rebaptisé France pour deux croisières " à la française ", embarquant entre autres de célèbres cuisiniers français. La première de ces croisières, du 1er au 10 décembre 1989, remporte un franc succès, mais la seconde l'année suivante sera plus mitigée.
Du 3 septembre au 3 octobre 1990, le Norway revient une nouvelle fois à Bremerhaven pour des transformations plus visibles de l'extérieur : deux ponts préfabriqués sont ajoutés au-dessus des anciens afin d'abriter 124 cabines de luxe, les cheminées sont dessoudées puis remises en place sur les nouveaux ponts, l'arrière du pont embarcations est redessiné. La navire perd ses lignes élégantes mais peut accueillir 2 560 passagers et 950 membres d'équipage.
Le 10 septembre 1996, le Norway revient au Havre depuis New York après 17 ans d'absence. Le lendemain, il entre en cale sèche dans la forme King Georges V à Southampton pour les dernières transformations : modernisation de cabines, transformation de magasins et des cheminées qui n'évacuent plus la fumée par les ailerons mais par une tuyauterie verticale plus efficace.
Le paquebot est fortement endommagé lors de l'explosion de l'une des 4 chaudières à Miami (États-Unis) le 25 mai 2003. Remorqué en Allemagne pour la réparation du système de propulsion, son état général reste très bon. Malheureusement au cours de l'hiver 2003, une tempête s'abat sur la mer du Nord et fait chavirer le dernier-né de la compagnie NCL, le Pride Of America. La compagnie décide la réparation de celui-ci qui est en construction, ce qui anéantit tout espoir de retour du Norway en mer. Il reste amarré jusqu'au 23 mai 2005 au Kaiserhafen III (le quai de l'Empereur) de Bremerhaven qu'il quitte avec l'aide de 5 remorqueurs. Sorti du port, le paquebot est pris en charge par le remorqueur De Da. Ils arrivent le 10 août 2005 au large de Port Klang, un grand port à environ 100 km à l'ouest de Kuala Lumpur en Malaisie occidentale où le Norway attend son sort. Il change de nom pour Blue Lady fin janvier 2006 [5].
Le 16 février 2006, le gouvernement bengladais interdit le démantèlement au Bangladesh du navire qui contient de l'amiante. Au lendemain, par ailleurs, de la décision du Conseil d'État français qui oblige Paris à rapatrier le Clemenceau qui devait être aussi démoli en Inde. Le 2 août 2006, la Cour suprême indienne autorise finalement le démantèlement en Inde du paquebot, et le 14 août 2006, le Blue Lady est amarré devant la plage d'Alang pour y être démoli[6]. Attendue en mars 2007 puis repoussée au 13 mai 2007, une décision de la Cour Suprême indienne a autorisé PriyaBlue, le démolisseur qui a racheté le bateau, à commencer le pompage de l’huile et du fuel se trouvant à bord et sous le contrôle d’experts de l’état de Gujarat [7]. Cette opération rend inéluctable son démantèlement sur place car le navire, échoué après presque un an sur une plage d'Alang, en devient de plus en plus inextricable, malgré deux projets de reprises encore présents.
Les autres dimensions sont inchangées