Mouvement antinucléaire - Définition

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Autocollant contre l'énergie nucléaire
Autocollant contre l'énergie nucléaire

Le mouvement antinucléaire désigne l'ensemble des personnes et organisations (associations, syndicats, partis politiques) qui s'opposent de façon générale à l'utilisation de l'énergie nucléaire. Cette opposition peut s'étendre de la bombe atomique aux armes utilisant l’uranium appauvri, jusqu'à la production d’électricité d’origine nucléaire, l’irradiation des aliments et l’utilisation de la radioactivité.

Les opposants au nucléaire soutiennent qu'il existe des solutions alternatives, tels que la non-violence, les économies d'énergie ou les énergies renouvelables.

Il existe aussi une opposition spécifique à l'arme nucléaire, que l'on peut qualifier de mouvement antinucléaire militaire.

Origine du mouvement antinucléaire

La technologie nucléaire est accusée par le mouvement antinucléaire d'être une " technologie à risque " pouvant mettre en danger les populations, en raison des problèmes de sécurité qu'elle implique.

Des centaines de groupes régionaux, nationaux ou internationaux (Greenpeace, le WWF, les Amis de la Terre (Friends of the earth), la Clamshell Alliance (Nouvelle-Angleterre), l'Abalone Alliance (Californie), Stop golfech (Tarn-et-Garonne),, ...) s'opposent au développement de l'énergie nucléaire, en soutenant qu'elle engendre de la pollution radioactive, des risques de prolifération nucléaire, des coûts économiques cachés et une grande vulnérabilité face au terrorisme. Certains groupes vont jusqu'à organiser des actions de désobéissance civile non-violente, telle l'inscription de slogans sur des tours de refroidissement de la centrale nucléaire de Belleville. Les propositions d'alternatives technologiques décentralisées comme les économies d'énergie, les panneaux solaires et les déplacements en vélo devenant la norme dans ces mouvements.

Certains prétendaient observer un fort lien entre les opposants à l'énergie nucléaire et ceux qui demandaient un désarmement unilatéral pendant la Guerre froide. D'autres lient le mouvement antinucléaire à des courants du mouvement environnementaliste qui prônent le respect de l'environnement et la responsabilité de léguer aux générations futures une terre sans déchets radioactifs.

Histoire

Après la seconde guerre mondiale

Le mouvement antinucléaire est né après la Seconde Guerre mondiale, en réponse aux bombardements atomiques sur le Japon. Le mouvement antinucléaire est alors un mouvement pacifiste, pour lequel les considérations écologiques sont absentes ou secondaires.

Le 18 mars 1950, l'Appel de Stockholm de Frédéric Joliot-Curie vise à interdir la bombe nucléaire dans le monde. Aux États-Unis, des personnalités telles que Barry Commoner ou Linus Pauling s'opposent aux essais nucléaires vers la fin des années 1950. En 1963 est créé le Mouvement Contre l'Arme Atomique (MCAA) par Claude Bourdet et Jean Rostand. La même année, le Traité d'interdiction partielle des essais nucléaires propose l'arrêt des essais atomiques atmosphériques au sol et dans les eaux, il est signé par plus de 150 nations à l'exception de la Chine et de la France. En 1964 a lieu la conférence internationale de Thyringen en Suède réunissant des organisations opposées à l'armement nucléaire se revendiquant du non-alignement. Le 26 avril 1964 est organisé un rassemblement de 120 000 personnes à l'appel du Comité National Contre la Force de Frappe (CNFF) dans le Parc des Seaux à Paris. Le 1er juillet 1968 est signé le Traité de non-prolifération nucléaire.

Les années 1970

Dans les années 1970, l'apparition de sensibilités environnementalistes ouvre le débat sur les conséquences de l'utilisation des technologies complexes, dont l'énergie nucléaire notamment parce qu'elle est alors dans une phase de développement et donc pas encore bien établie, mais également parce qu'elle est intimement liée aux technologies et concepts de l'arme nucléaire, rapport qui a été codifié lors de la signature du traité de non-prolifération nucléaire.

  • 12 avril 1971 : Première manifestation contre le nucléaire civil en France, 1,500 personnes participent à la marche sur Fessenheim.
  • 10 et 11 juillet 1971 : Marche pacifique face à la centrale nucléaire du Bugey réunissant 15,000 personnes.
  • 1975 : Occupation du chantier de la centrale nucléaire de Wyhl (Allemagne) par 25.000 militants pendant 8 mois. De Kaisergaust (Suisse) à Gerstheim (Bas-Rhin), 12 projets de réacteurs sur le Rhin sont abandonnés.
  • 4 juillet 1976 : 20 000 opposants venus manifester pacifiquement contre Superphénix organisent un sit-in dans le calme. [1]
  • 1977 : lors d'une manifestation de 60 000 personnes Mort de Vital Michalon, tué lors d'une manifestation contre Superphénix à Creys-Malville en France
  • 1979 : Accident nucléaire de Three Mile Island aux États-Unis
  • 1979 : Vote par référendum de l’arrêt du nucléaire en Suède

Les années 1980

Manifestation contre la construction de Cattenom en 1980
Manifestation contre la construction de Cattenom en 1980

Dans les années 1980, l'opposition à l'énergie nucléaire s'exprime sur des bases environnementales : pollution de l'eau des fleuves et rivières, accidents de réacteur nucléaire connus ou potentiels, fuites de produits radioactifs pendant des livraisons, stockage ou traitement des déchets radioactifs à long terme.

  • 1980 : opposition et arrêt du projet de centrale nucléaire de Plogoff
  • 1986 : Catastrophe de Tchernobyl
  • 1986 : Vote par référendum de l'arrêt du nucléaire en Italie
  • 1987 : Abandon du projet d'usine de retraitement nucléaire de Wackersdorf (Allemagne) après de nombreuses manifestations et une pétition enregistrée par la cours constitutionnelle de Bavière.

Les années 1990

  • 1990 : Vote par référendum d'un moratoire sur la construction de nouvelles centrales nucléaires en Suisse (moratoire non renouvelé au cour d'un second référendum en 2003, qui demandait également l'abandon de l'énergie nucléaire)
  • 1994 : Décision du parlement de l'arrêt du nucléaire aux Pays-Bas
  • juillet 1999 : Vote de l'arrêt du nucléaire en Belgique

Le XXIème siècle

  • 2000 : Décision de l'arrêt du nucléaire en Allemagne
  • 2003 : En Suisse, suite à référendum, non-renouvellement du moratoire sur la construction de nouvelles centrales et refus d'un abandon de l'énergie nucléaire.
  • 2006 : Manifestation à Cherbourg contre le projet de réacteur EPR à Flamanville, rassemblant près de 30 000 personnes selon les organisateurs, 12 500 selon la police et plus de 20 000 selon les renseignements généraux locaux.[2]
  • 2007 : Manifestations à Rennes, Lille, Toulouse, Lyon et Strasbourg contre la construction du réacteur nucléaire EPR à Flamanville. 62 000 manifestants à travers toute la France selon les organisateurs. [3]

Aspects culturels

Le mouvement antinucléaire a été popularisé par des artistes américains : Bonnie Raitt et Jackson Browne ont enregistré des chansons sur l'énergie nucléaire et ses alternatives, et beaucoup d'entre eux se faisaient arrêter dans des manifestations. De nombreux autres films étaient tournés sur le sujet, comme Le Syndrome chinois (nominé aux Academy Awards de 1979) et Le Mystère Silkwood, qui illustrent les effets de fusion du cœur et de contamination radioactive.

En France, de nombreux artistes (tels que Jean-Yves Chetail, Marcel et son orchestre, Kent, les Wampas, ...) se sont produits dans des concerts en faveur de la sortie du nucléaire.

Le mouvement antinucléaire dans le monde

En Europe

En Allemagne, en Belgique, en Autriche, en Suède, sous l'influence des écologistes (souvent antinucléaires), les gouvernements ont décidé d'abandonner la filière électro-nucléaire progressivement et de ne pas construire de nouvelles centrales nucléaires.

En France

En France, pays disposant du plus grand nombre de réacteurs nucléaires par habitant au monde (58 réacteurs pour 65 millions d'habitants), les antinucléaires dénoncent le risque d'accident nucléaire, estiment qu'il n'y a pas de solution acceptable pour les déchets radioactifs et que le coût réel du démantèlement des installations nucléaires est sous-estimé.

Ils estiment que l'État est coupable de désinformation concernant le passage du " nuage " de la catastrophe de Tchernobyl sur la France.

Le 31 juillet 1977, une manifestation à Creys-Malville rassemble plus de 50 000 manifestants devant le surgénérateur Superphénix. Elle se solde par la mort d'un manifestant, Vital Michalon, 31 ans, et de nombreux blessés.

En 1978, afin de réduire le déficit électrique de la Bretagne, le gouvernement français envisage d'implanter une centrale nucléaire sur la commune de Plogoff. Le projet est rejeté par de nombreux habitants de la région, rejoints par des opposants français et étrangers à l'énergie nucléaire. Le conflit se terminera par l'abandon du projet.

En 1999 et 2000, de multiples manifestations ont empêché la recherche d'un site destiné à accueillir un laboratoire de caractérisation du granite comme roche hôte pour le stockage de déchets radioactifs HAVL et MALV. La "Mission de concertation granite", composée de trois haut-fonctionnaires, n'a pu organiser les concertations prévues. Dans son rapport[4], la " Mission de concertation granite " écrit : "L’association Sortir du nucléaire s’est montrée particulièrement active en divulguant la carte des sites, épisode présenté comme une fuite, en assurant partout la résistance à la concertation, et en favorisant par l’intermédiaire de ses membres l’organisation de manifestations locales". En l'absence de site granite, le seul laboratoire souterrain est le Laboratoire de recherche souterrain de Meuse/Haute-Marne implanté à Bure et qui caractérise une roche hôte argileuse.

En 2006, à l'occasion du 20e anniversaire de l’accident de Tchernobyl, des inconnus inscrivent des graffitis devant l’entrée de l'EPFL  pour protester contre les expériences de fusion nucléaire qui s’y déroulent
En 2006, à l'occasion du 20e anniversaire de l’accident de Tchernobyl, des inconnus inscrivent des graffitis devant l’entrée de l'EPFL pour protester contre les expériences de fusion nucléaire qui s’y déroulent[5]

En marge du mouvement antinucléaire en Europe

Le mouvement antinucléaire a été marqué par des évenements violents :

  • En novembre 1979, Marco Camenisch sabote des pylônes électriques à l'explosif, pour être " solidaire de la résistance contre les centrales nucléaires, de la résistance sociale et écologiste et de la lutte révolutionnaire de libération sociale contre la domination de classe et contre l'exploitation de l'homme et de la nature ". [6]
  • Dans la nuit du 18 janvier 1982, cinq roquettes sont tirées contre le chantier de la centrale nucléaire de Superphénix, sans que les auteurs de l'attentat soient identifiés. En 2002, Chaïm Nissim, ancien député écologiste de Genève, affirme être l'auteur de l'attentat et s'être procuré le lance-roquettes auprès du groupe du terroriste Carlos. En 2003, José Romelé, secrétaire général du syndicat UNSA de la centrale nucléaire de Civaux, déclare avoir lancé des poursuites criminelles pour " tentative d'homicide involontaire avec début d'exécution, attentat par explosif, atteinte à la liberté du travail " et " apologie de crime ". [7][8][9]. Chaïm Nissim espère échapper à une mise en examen par une possible prescription de ses actes, notamment en Suisse[10].
  • En 1985, le sabotage du Rainbow Warrior commandité par le Ministère de la Défense français a entraîné la mort d'un militant de l'association Greenpeace, tué lors de l'explosion des mines placées sous le bateau. Ce sabotage visait à empêcher Greenpeace de continuer à pénétrer illégalement dans la zone militaire française autour des sites où étaient expérimentées les explosions nucléaires.[11]
  • Le 7 novembre 2004, à Avricourt, le militant antinucléaire Sébastien Briat (21 ans) meurt, une jambe sectionnée par une locomotive au cours d'une tentative de blocage d'un transport ferroviaire de déchets nucléaires. Les autres participants ont par la suite reconnu "La vitesse de l'événement nous a dépassé".[12]

Critiques du mouvement antinucléaire

Les tenants de l'énergie nucléaire estiment que les antinucléaires donnent une priorité importante à la sortie du nucléaire civil par rapport à d'autres problèmes écologiques (cf arrivée au pouvoir des Verts au gouvernement en Allemagne en 2001).

Selon Jean-Marc Jancovici, les ONG environnementales qui acceptent les conclusions du GIEC sans les discuter sont toutes à peu près unanimes pour réfuter celles de l'OMS sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl[13]. Au contraire, certains antinucléaires se défient des conclusions de l'OMS qui serait, selon leur interprétation de l'accord entre l'OMS et L'AIEA de 1959, " assujétie " à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA)[14].

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