Avec leur capacité à transporter des molécules thérapeutiques et favoriser la croissance des tissus vivants, les hydrogels sont au coeur de nombreux programmes de recherche. Des chercheurs du CNRS, de l'université de Toulouse Paul Sabatier et de l'Inserm proposent une nouvelle technique pour modeler des hydrogels supramoléculaires sous forme de fils. Publiés dans la revue
Nanoscale, ces travaux pourraient aboutir à des supports flexibles pour
la culture cellulaire ou permettre le filage d'autres
matériaux.
Fil d'hydrogel de N-heptyl-D-galactonolactone et assemblage des nanofibres suivant un vortex
© Juliette Fitremann (gauche)
© Anaïs Chalard et CMEAB, Toulouse (droite)
Les hydrogels, qui résultent du gonflement d'un réseau de
fibres par de l'eau, sont très prisés dans le domaine biomédical car ce sont des matériaux cohésifs, mais ayant une teneur en eau qui dépasse souvent 95 %. Certaines applications, comme l'impression 3D, gagnent à pouvoir les injecter ou leur donner des formes particulières, ce qui n'est pas toujours possible en raison de leur
fragilité. Cas particuliers, les gels supramoléculaires sont préparés non pas à partir d'un réseau de
polymère, mais à partir de petites molécules qui s'autoassemblent en fibres. Des chercheurs du laboratoire Interactions moléculaires et réactivité chimique et photochimique (IMRCP, CNRS/Université de Toulouse Paul Sabatier), du Laboratoire d'analyse et d'
architecture des systèmes du
CNRS (LAAS-CNRS, CNRS) et du Toulouse neuroimaging center (TONIC, Inserm/Université Toulouse III) ont mis au
point une nouvelle méthode, qui leur a permis de filer un hydrogel de N-heptyl-D-galactonolactone. L'équipe avait précédemment utilisé les hydrogels de cette petite
molécule pour
la culture de neurones.
Ces "spaghettis" d'hydrogel sont obtenus grâce à l'injection dans de l'eau d'un jet de
diméthylsulfoxyde (DMSO) parfaitement défini et délimité et dans lequel le gélifiant a été solubilisé. La
diffusion progressive de l'eau au sein du jet de DMSO aide la N-heptyl-galactonolactone à s'autoassembler sous forme de fibres nanométriques et, ainsi, à former un filament de gel continu. De plus, à l'échelle microscopique, les fibres s'organisent radialement par rapport à l'axe du "spaghetti", révélant ainsi la façon dont l'eau s'est propagée dans le DMSO. Lorsque l'injection de la solution de gélifiant dans l'eau est très rapide, des vortex se forment dans le jet et provoquent l'assemblage des fibres en
spirale. Ce phénomène, absent des autres méthodes de filage d'hydrogels, intrigue les chercheurs qui espèrent l'utiliser pour obtenir des matériaux organisés à haute
surface spécifique. Enfin, cette technique ouvre la possibilité d'imprimer en 3D ce type d'hydrogels et de fournir ainsi des supports fortement hydratés de forme bien contrôlée pour la culture cellulaire.
Référence
Anaïs Chalard, Pierre Joseph, Sandrine Souleille, Barbara Lonetti, Nathalie Saffon-Merceron, Isabelle Loubinoux, Laurence Vaysse, Laurent Malaquin, Juliette Fitremann.
Wet spinning and radial self-assembly of a carbohydrate low molecular weight gelator into well organized hydrogel filaments
Nanoscale - Juin 2019.
DOI:10.1039/C9NR02727K