Des physiciens de l'UNIGE ont découvert une nouvelle propriété quantique: en plaçant trois paires de photons en réseau, il est possible de les intriquer entre eux et de créer de nouvelles corrélations ultra fortes.
Un réseau quantique avec une structure triangulaire présente des corrélations quantiques nonlocales d'un type fondamentalement nouveau. © UNIGE
Une des propriétés propres aux particules quantiques est l'intrication: par exemple, lorsque deux photons sont intriqués, l'état quantique du premier sera parfaitement corrélé à l'état quantique du second, même s'ils sont éloignés l'un de l'autre. Mais que se passe-t-il lorsque l'on place en réseau trois paires de photons intriqués que l'on sépare de leur jumeau ? Des chercheurs de l'
Université de Genève (L'université de Genève (UNIGE) est l'université publique du canton de Genève en...) (UNIGE), en collaboration avec l'
Institut (Un institut est une organisation permanente créée dans un certain but. C'est...) de
recherche (La recherche scientifique désigne en premier lieu l’ensemble des actions entreprises en vue...) en sciences fondamentales (IPM) de Téhéran, ont prouvé théoriquement qu'une nouvelle forme de corrélations quantiques en réseau est possible: en forçant deux photons de paires distinctes à s'intriquer, la liaison se fait également avec leur
photon (En physique des particules, le photon est la particule élémentaire médiatrice de l'interaction...) jumeau présent ailleurs dans l'espace du réseau,
formant (Dans l'intonation, les changements de fréquence fondamentale sont perçus comme des variations de...) un
triangle (En géométrie euclidienne, un triangle est une figure plane, formée par trois points...) ultra corrélé. Ces résultats, à lire dans la revue
Physical Review Letters, ouvrent de nouvelles perspectives d'applications en
cryptographie (La cryptographie est une des disciplines de la cryptologie s'attachant à protéger des messages...), tout en offrant un renouveau de la
physique quantique (La physique quantique est l'appellation générale d'un ensemble de théories physiques...) à son niveau le plus fondamental.
L'intrication signifie que deux particules quantiques, par exemple des photons, ne forment qu'un seul système physique, malgré la distance les séparant. Chaque action sur l'un des deux photons se répercute alors sur son photon "jumeau". Ce principe d'intrication donne lieu à la non-localité quantique: les mesures et
statistiques (La statistique est à la fois une science formelle, une méthode et une technique. Elle...) des propriétés observées sur un des photons sont intimement corrélées aux mesures effectuées sur l'autre photon. "La non-localité quantique a été découverte théoriquement par John Stewart Bell en 1964 et a permis de démontrer que les corrélations des photons sont de nature purement quantique, et ne peuvent donc pas être expliquées par la physique classique, explique Nicolas Brunner, professeur associé au Département de physique appliquée de la Faculté des sciences de l'UNIGE. Ce principe pourrait être utilisé pour générer des clés de
chiffrement (En cryptographie, le chiffrement (parfois appelé à tort cryptage) est le procédé grâce auquel...) ultra sécurisées."
Forcer l'intrication de photons en réseau: est-ce possible?
Mais est-ce que ce principe de non-localité quantique fonctionne toujours si l'on place plusieurs paires de photons en réseau ? "Pour répondre à cette question, nous avons imaginé une expérience comprenant trois paires de photons qui sont ensuite séparées et dispersées en trois points formant un triangle: à chaque sommet, deux photons d'une paire
différente (En mathématiques, la différente est définie en théorie algébrique des...) se retrouvent
ensemble (En théorie des ensembles, un ensemble désigne intuitivement une collection...)", explique
Marc-Olivier Renou,
chercheur (Un chercheur (fem. chercheuse) désigne une personne dont le métier consiste à faire de la...) au Département de physique appliquée de la Faculté des sciences de l'UNIGE.
Dans un deuxième temps, les physiciens ont forcé les deux photons de chaque sommet du triangle à s'intriquer en les faisant interagir entre eux, puis ils ont effectué une mesure sur eux. Enfin, ils ont démontré que les statistiques résultants de ces mesures ne peuvent pas s'expliquer par une théorie physique locale. Qui plus est, ces statistiques sont si fortement corrélées, qu'elles pourraient représenter une nouvelle forme de corrélations quantiques. "Cela pourrait devenir une nouvelle version du
théorème (Un théorème est une proposition qui peut être mathématiquement démontrée, c'est-à-dire une...) de Bell, propres aux réseaux quantiques", s'enthousiasme Nicolas Brunner.
Cette importante découverte théorique souligne la puissance des corrélations quantiques dans les réseaux, qui dépasse largement ce qu'imaginaient les chercheurs. L'étape suivante consistera à observer ces phénomènes au laboratoire. "Ceci ne va pas être un jeu d'enfant, car la réalisation d'une telle expérience reste pour l'instant extrêmement ardue", conclut
Nicolas Gisin, professeur au Département de physique appliquée de la Faculté des sciences de l'UNIGE.
Contact chercheur:
Nicolas Brunner - Professeur associé au Département de physique appliquée- Faculté des sciences
Nicolas.Brunner at unige.ch
Référence publication:
Cette recherche est publiée dans
Physical Review Letters
DOI: 10.1103/PhysRevLett.123.140401