Quand une nanoparticule d'or rougit sous la pression

Publié par Adrien le 12/02/2019 à 08:00
Source: CNRS INP
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En combinant des techniques de microscopie laser et de hautes pressions, des physiciens ont mis au point la première méthode expérimentale permettant de mesurer avec précision l'absorption optique d'une nanoparticule individuelle d'or soumise à une forte pression.

Lors de la réduction d'un matériau à l'échelle nanométrique, la présence d'interfaces avec l'extérieur et le grand rapport surface-volume des nano-objets rendent leurs propriétés très sensibles aux effets de confinement et à leur environnement. Dans le domaine optique, cette dépendance peut être utilisée pour ajuster l'absorption de la lumière par des nanoparticules métalliques, en contrôlant finement leur environnement, notamment par l'application de pressions élevées.


La méthode d'étude de l'absorption optique d'une nanoparticule individuelle d'or en fonction de la haute pression appliquée (droite) repose sur la combinaison d'un microscope à "modulation spatiale" avec une cellule à enclume de diamant miniature (gauche). © ILM (CNRS/Université Lyon 1)

À ce jour, seules quelques expériences d'absorption optique ont démontré cette faisabilité sur des "ensembles" de nanoparticules d'or ou d'argent insérées dans une cellule à enclume de diamant, un dispositif qui permet d'atteindre des pressions de plusieurs centaines de Gigapascal (comparables à celles au coeur des planètes). Cependant, la compréhension précise de la manière dont les conditions de pression extrêmes modifient les propriétés physiques ne peut être obtenue que par des observations au niveau de la particule "unique", ce qui évite les effets de moyenne parasites qui affectent inévitablement les mesures sur des ensembles.

Effectuer des mesures optiques sur une seule nanoparticule à haute pression est cependant très difficile, car cela nécessite de répondre simultanément aux exigences expérimentales de la microscopie optique de nano-objets individuels et de la spectroscopie sous hautes pressions. Des chercheurs et ingénieurs en sciences des matériaux, mécanique et optique, de l'Institut lumière matière à Lyon (ILM, CNRS/Université Lyon 1) ont relevé le défi en focalisant un faisceau laser. Pour cela, ils ont minimisé les aberrations induites par le passage à travers le diamant de la cellule. Côté mécanique, la difficulté consistait à déplacer rapidement la position de la nanoparticule à l'intérieur et à l'extérieur du faisceau laser. Grâce à ce dispositif, les chercheurs ont ainsi pu montrer la dépendance à la pression de la "résonance plasmon de surface" de nanoparticules métalliques. Cette résonance correspond à une brutale augmentation de l'absorption à des longueurs d'onde spécifiques, qui confère aux nanoparticules métalliques une coloration inhabituelle dépendante de leur forme, taille, et environnement. Les mesures des spectres d'absorption de nano-bipyramides d'or uniques montrent que leur résonance plasmonique se décale nettement vers les grandes longueurs d'onde (voir image), lorsque la pression augmente de 0 à 10 GPa. Cette évolution a pu être interprétée à la fois par des simulations électromagnétiques et par un modèle analytique simplifié. Contrairement aux précédentes expériences à haute pression, cette analyse dévoile les phénomènes physiques à l'origine de cette réponse: elle permet de séparer quantitativement les contributions diélectriques du métal et de l'environnement au décalage spectral induit par la pression, démontrant leur importance respective.

Ces travaux établissent un pont entre les domaines de la nano-optique et de la physique des hautes pressions, ouvrant ainsi une nouvelle voie pour l'étude quantitative de la réponse physique de nano-objets individuels sous contraintes mécaniques. De plus, les propriétés optiques et électroniques étant fortement corrélées, le système est également adapté pour étudier la conductivité des nanotubes de carbone, de systèmes à base de fullerène et des matériaux bidimensionnels en fonction de la pression, avec des applications potentielles dans de nombreux secteurs industriels. Ce travail est publié dans la revue ACS Nano.
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