Des paysages chimiques insoupçonnés dans les milieux poreux

Publié par Isabelle le 27/06/2020 à 13:00
Source: CNRS INSU
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Les écoulements fluides à travers un milieu poreux conditionnent le transport, le mélange et la réaction de la matière inerte et vivante dans de nombreux systèmes naturels (aquifères, roches fracturées, sols) et industriels (réacteurs, batteries, piles à combustible). Aujourd'hui, la grande majorité des modèles de transport dans ces milieux hétérogènes reposent sur une hypothèse d'homogénéité des paysages physico-chimiques (e.g. la distribution spatio-temporelle des éléments) en dessous de l'échelle caractéristique définie par la taille des pores, qui justifie l'usage d'un coefficient de dispersion effectif. Cependant, cette approche moyenne mène à d'importantes erreurs dans la prédiction de processus chimiques et biologiques, attribuées à la persistance de gradients de concentration aux micro-échelles. Jusqu'à aujourd'hui, l'origine physique de ces gradients était restée largement inconnue.


Mélange d'un fluide (orange) injecté dans un écoulement stationnaire et laminaire d'un autre fluide (bleu) à travers un milieu poreux 3D (empilement aléatoire de billes dont la section est visible par les disques noirs). Il donne lieu à des dynamiques chaotiques d'étirement et de repliement des interfaces (striations). Ces dynamiques participent à maintenir des gradients chimiques forts en dessous de l'échelle du pore (échelle donnée par la taille caractéristique des disques noirs).

Grâce à des expériences menées en laboratoire à l'Observatoire des sciences de l'Univers de Rennes, une équipe de chercheurs de Géosciences Rennes et du RMIT (Australie) a pu observer pour la première fois les structures formées à micro-échelle par le mélange de deux fluides dans un empilement aléatoire de billes, l'archétype du milieu poreux. Ces images originales mettent en évidence un mécanisme systématique de mélange dit "chaotique" qui repose sur l'étirement et le repliement exponentiel des interfaces de contact entre les fluides. Ce processus permet de maintenir des gradients de concentration importants bien en dessous de l'échelle des pores. Fait troublant, ces images ont révélé que ces dynamiques chaotiques étaient entièrement contrôlées par les zones de contact entre les billes, offrant un cadre simple à une quantification du mélange par la géométrie du milieu poreux.

En repoussant les limites du paradigme actuel, ces résultats démontrent les potentialités d'une nouvelle génération de modèles de transport réactif reposant sur la physique du mélange aux micro-échelles et ouvrent de nouvelles voies dans la compréhension du fonctionnement des milieux poreux naturels et artificiels.

En savoir plus:
Joris Heyman, Daniel R. Lester, Régis Turuban, Yves Méheust, Tanguy Le Borgne. Stretching and folding sustain microscale chemical gradients in porous media. Proceedings of the National Academy of Sciences May 2020, 202002858; DOI: 10.1073/pnas.2002858117.
https://www.pnas.org/content/early/2020/05/27/2002858117

Contact:
Joris Heyman - Géosciences Rennes/OSUR
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