Dans le corps humain, les cellules exercent des forces sur les tissus et les organes pour, en quelque sorte, modeler les structures biologiques. Grâce à un nouvel outil mis au point à l'Université McGill, les scientifiques peuvent désormais observer et définir ces forces.
En laboratoire, Christopher Moraes, professeur adjoint au Département de génie chimique de l'Université McGill, et ses collègues ont conçu des
capteurs sphériques semblables à des ressorts qui se déforment sous l'effet d'une contrainte
mécanique dans un tissu en trois
dimensions. Les capteurs ont presque la même taille que les cellules individuelles qui composent le tissu. Au moyen de techniques d'
imagerie et de méthodes computationnelles, les chercheurs ont réussi à calculer les forces générées par les cellules qui causent la déformation des sphères.
Les "capteurs à jauge de contrainte microsphériques" ont d'abord été utilisés pour l'étude de cellules qui se regroupent en vue de former une
culture cellulaire en trois dimensions. L'équipe du Pr Moraes a observé la formation spontanée,
autour du groupe de cellules, d'une "enveloppe" qui garde le tissu intact et sous compression mécanique. Cette découverte a fait l'objet d'un article publié récemment dans la revue
Nature Communications.
"Il est logique que certaines forces agissent pour comprimer les sphères puisqu'il ne peut jamais y avoir de déformation sans contrainte. Toutefois, il est plutôt surprenant de constater que l'enveloppe n'a pas
besoin d'un
degré de
tension élevé pour compenser les efforts de compression importants qui règnent dans le tissu. On constate que l'action coordonnée de cellules relativement faibles peut produire des effets marqués", explique le Pr Moraes, qui est également titulaire de la Chaire de
recherche du Canada en microenvironnements cellulaires avancés.
Il précise qu'en étant capable de visualiser les forces en jeu au sein des cultures biologiques, on peut mieux étudier les liens complexes entre les cellules et les phénomènes mécaniques qui les entourent.
"La capacité de mesurer les forces localisées dans les tissus multicellulaires est essentielle à la compréhension des processus de leur développement. En outre, elle pourrait nous aider à mettre au point des stratégies d'ingénierie tissulaire novatrices", ajoute le Pr Moraes.
Cette étude a été financée par la Société canadienne du cancer, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et les Instituts nationaux de la
santé des États-Unis.
L'article "Dispersible hydrogel force sensors reveal patterns of solid mechanical
stress in multicellular spheroid cultures", rédigé par Wontae Lee et coll., a été publié en ligne dans la revue
Nature Communications le 11 janvier 2019.