Des expériences confortent l'existence de fusion partielle dans le manteau supérieur

Publié par Adrien le 07/06/2016 à 00:00
Source: CNRS-INSU
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Sur la base de mesures expérimentales de la vitesse de propagation des ultrasons dans des échantillons de hautes pressions et températures, une équipe de chercheurs du Laboratoire Magmas et Volcans de Clermont-Ferrand (CNRS/IRD/Université Blaise Pascal) et du Center for Advanced Radiation Source de l'Université de Chicago montrent que la fusion partielle est compatible avec les anomalies sismiques observées dans le manteau entre ~80 et 350 km de profondeur (asthénosphère). Ils observent en particulier qu'un taux de fusion partielle supérieur à 0.1% peut produire une diminution significative des vitesses sismiques (Vp et Vs), ainsi qu'une augmentation de l'atténuation. La présence de liquide dans l'asthénosphère pourrait favoriser un découplage mécanique entre le manteau supérieur et les plaques lithosphériques, ce qui pourrait dominer les relations entre la tectonique des plaques et la dynamique du manteau. Par contre, la fusion partielle ne permet pas d'expliquer les très forts rapports de vitesses Vp/Vs observés ponctuellement dans le manteau, impliquant alors la présence de fluides riches en éléments volatils.


Microstructure d'un échantillon contenant une fraction volumique de basalte de 0.5%. Le film de basalte recouvre presque intégralement la surface des grains d'olivine et se trouve connecté sur toute la longueur de l'échantillon. Différentes expériences ont été effectuées avec différentes fractions de basalte. J. Chantel et al 2016


La fusion du basalte au-dessus de ~1550 K induit une variation significative des vitesses de propagation des ultrasons. Une diminution de Vs est observée pour un volume de basalte supérieur à 0.1%. J. Chantel et al 2016

De fortes anomalies sismiques sont observées pour des profondeurs supérieures à ~80 km dans le manteau terrestre. Les caractéristiques sont une nette diminution des vitesses sismiques avec la profondeur (un comportement inhabituel pour les silicates), une réduction significative du facteur de qualité, ainsi qu'un maximum d'anisotropie. Une forte augmentation de la conductivité électrique est également connue dans ces mêmes régions du manteau. L'origine de ces anomalies reste très débattue. Pour certains auteurs les faibles vitesses sismiques peuvent s'expliquer par une évolution rapide des constantes élastiques lorsque la température approche le point de fusion de la péridotite (roche principale manteau). D'autres attribuent l'anomalie de vitesse à la fusion partielle du manteau. Les deux hypothèses ont des implications géologiques fondamentalement différentes, en particulier car la présence de liquide réduit considérablement la viscosité et favorise la ségrégation chimique.

Les chercheurs ont réalisé une étude systématique de la vitesse de propagation des ultrasons dans des échantillons composés d'un mélange d'olivine et d'une fraction variable de basalte. La fusion du basalte à haute température produit des matériaux bi-phasiques avec une fraction contrôlée de solide et liquide (Figure). Le couplage avec le rayonnement synchrotron a permis d'affiner les conditions expérimentales et en particulier la longueur des échantillons. Après comparaison avec les observations sismologiques, les mesures expérimentales de VP, VS et d'atténuation suggèrent un taux de fusion entre 0.1 à 0.3% dans le manteau. Les études antérieures ne permettaient pas de penser qu'un si faible taux de fusion pouvait affecter les vitesses sismiques de façon aussi significative. Pourtant, les valeurs obtenues dans cette nouvelle étude sont compatibles avec des observations pétrographiques et des modèles de conductivité électrique.

La présence de liquide entre 80 et 350 km de profondeur pourrait faciliter la déformation par cisaillement qui est requise pour un mouvement relatif des plaques tectoniques rigides reposant sur le manteau. Le cisaillement pourrait favoriser la formation de roches stratifiées avec accumulations potentielles des liquides dans des zones alignés, ce qui renforcerait encore la dissociation mécanique entre la lithosphère et le manteau. Selon les contextes géologiques, les liquides pourraient rester piégés dans le manteau ou migrer jusqu'à la surface en provoquant du volcanisme intraplaque. Ceci pourrait entrainer des variations régionales et temporelles des mouvements de plaques, depuis l'ouverture des dorsales médio-océaniques jusqu'à la contraction au niveau des zones de subduction.
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