Des cyanobactéries datant de 100 millions d'années !

Publié par Michel le 29/01/2009 à 00:00
Source: CNRS / INSU
Illustrations: © Geosciences Rennes; © CNRS-INSU, Rennes I
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Quoi de plus difficile, en paléontologie, que d'identifier sans équivoque des bactéries fossiles ? Des paléontologues de Géosciences Rennes (CNRS-INSU, Rennes I), en collaboration avec un microbiologiste du laboratoire Ecosystèmes, biodiversité, évolution (CNRS-INEE, Rennes I) viennent pourtant de révéler la présence de cyanobactéries (algues bleues) datant de 100 millions d'années dans de l'ambre fossile provenant des gisements de Charente Maritime. Une étude qui vient de paraître dans Journal of Paleolimnology.


Filaments de cyanobactéries (Palaeocolteronema cenomanensis) présentes dans de l'ambre
datant de 95 à 100 millions d'années. Charente Maritime (France)

Les cyanobactéries ont été parmi les tout premiers organismes à se développer sur Terre, il y a plus de 2 milliards d'années. Elles sont encore aujourd'hui très présentes dans les écosystèmes actuels formant des colonies filamenteuses. Pourtant, les traces fossiles de leur existence sont rares et généralement difficiles à mettre en évidence. En révéler demande des précautions particulières, notamment afin de différencier les bactéries réellement fossiles des bactéries actuelles qui polluent les roches anciennes. C'est dans un milieu exceptionnel pour leur développement et leur conservation, des résines fossiles (ambre) du milieu du Crétacé (95 à 100 millions d'années), qui ont par ailleurs déjà révélé une incroyable richesse d'organismes fossiles (insectes, araignées, ...), que les auteurs de l'article ont observé et identifié des cyanobactéries.

Pour éviter toute pollution microbiologique récente, voire actuelle, de la résine fossile, chaque échantillon étudié a subi un traitement spécial afin d'éliminer les contaminants inorganiques (tels que des diatomées) et les contaminants organiques, en particulier toute trace d'incrustation par des bactéries ou du mycélium actuels. Malgré ces traitements corrosifs, l'ambre n'a pas été détruit et de nombreux microorganismes pris dans la résine ont pu être observés, tels que les cyanobactéries identifiées comme appartenant à une espèce disparue, Palaeocolteronema cenomanensis.


Filaments de cyanobactéries (Palaeocolteronema cenomanensis) présentes dans de l'ambre
datant de 95 à 100 millions d'années.

Les cyanobactéries se sont installées et développées à la périphérie des coulées de résine alors que celles-ci étaient encore relativement fraîches et non durcies, formant des filaments qui ont envahi chaque nodule d'ambre. Leur grande abondance en a modifié l'aspect. S'est ainsi développée une croûte laiteuse blanche ou beige, parfois d'aspect plâtreux, sur des coulées de résine dont le coeur, dépourvu de cyanobactéries, a conservé son aspect translucide et coloré. Plus précisément les filaments cyanobactériens ont eu une croissance centripète dans la résine avant que celle-ci ne durcisse, entre le début de la coulée résineuse et sa fossilisation sous forme d'ambre. Ces cyanobactéries, quasi contemporaines de la production de résine qui a donné l'ambre, sont donc bien fossiles. Cette découverte montre que ces micro-organismes utilisaient des résines végétales pour se développer, à la fois comme simple support de croissance mais aussi peut être comme substance nutritive.


Filaments de cyanobactéries (Palaeocolteronema cenomanensis) présentes dans de l'ambre
datant de 95 à 100 millions d'années.

Enfin, s'il est une chose que les paléontologues ne peuvent que supposer, c'est bien la couleur des fossiles. Les cyanobactéries découvertes dans les ambres charentais vieux de 100 millions d'années dérogent à cette règle. En effet, certains filaments fossiles ont conservé leur couleur d'origine, légèrement bleutée. Des mesures en laboratoire, à l'aide d'une sonde détectant les pigments bleus, ont montré que cette couleur est bien due à de la phycocyanine, pigment caractéristique des cyanobactéries (organismes appelés autrefois "algues bleues").

Ainsi, l'ambre apparaît comme une piste prometteuse pour des recherches en paléomicrobiologie, un domaine encore très peu exploré.

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