Coronavirus: suivre la pandémie en direct grâce aux eaux usées

Publié par Adrien le 12/06/2020 à 09:00
Source: Université Laval
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Il existe une façon simple et peu coûteuse de prendre quotidiennement le pouls de la pandémie de COVID-19 dans toute la population. Il s'agit de mesurer la présence du SARS-CoV-2, ce coronavirus provoquant la maladie COVID-19, dans les eaux usées des usines d'épuration. Vous doutez de la précision de cette méthode ? "Il suffit qu'une personne sur 100 000 ait la COVID-19 pour qu'on puisse détecter la présence du coronavirus dans 1 litre d'eaux usées", souligne Peter Vanrolleghem, professeur au Département de génie civil et de génie des eaux et directeur du centre de recherche CentrEau.


Illustration de coronavirus, similaires à ceux engendrant la maladie COVID-19

Cette approche du suivi épidémiologique de la pandémie présente de nombreux avantages qui enthousiasment le professeur Vanrolleghem. Le premier: tester quotidiennement un échantillon d'eaux usées prélevé dans une usine d'épuration équivaut à tester une fois par jour toute la population desservie par cette usine. "Et c'est beaucoup plus rapide et beaucoup moins cher que des tests cliniques pour toute cette population", précise-t-il.

Par exemple, pour une usine comme celle de l'est de la ville de Québec, l'analyse d'un échantillon d'eaux usées équivaut à tester 300 000 personnes. "On ne saura pas qui est porteur du SARS-CoV-2, mais on pourra déterminer si le coronavirus est présent dans la population et si son abondance est stable, en baisse ou en hausse. Cette approche peut donc être très utile pour évaluer les effets de certaines mesures de confinement ou de déconfinement ou encore pour détecter l'arrivée d'une deuxième vague de la pandémie."

Le second avantage de cette approche épidémiologique est que le portrait dressé à partir des analyses d'eaux usées dépeint ce qui se passe en temps réel dans la population. "Dès qu'une personne est porteuse du virus, on peut en détecter la présence dans ses selles, même si elle n'a pas encore de symptômes et même si elle n'en développe jamais, signale le professeur Vanrolleghem. En supprimant le délai d'incubation avant l'apparition des symptômes, l'analyse des eaux usées nous permet de combler l'écart de 7 jours qui existe présentement entre la situation réelle de la pandémie sur le terrain et le portrait qu'on en fait à partir des échantillons oraux et nasaux provenant des centres de prélèvements."

Un suivi à l'échelle canadienne

Il reste toutefois quelques problèmes à régler avant d'implanter cette approche sur le terrain, reconnaît le professeur Vanrolleghem. Dans un article scientifique qu'il vient de publier dans le Water Quality Research Journal avec quatre collègues australiens, le chercheur souligne qu'on manque encore d'informations sur l'intensité et la durée de largage du virus dans les selles des personnes infectées. "Le résultat est qu'on ne peut pas encore convertir le nombre de particules virales par litre d'eaux usées en nombre de personnes porteuses du virus. Mon équipe travaille à la création d'un modèle qui permettra de corriger cette lacune."

Par ailleurs, il n'y a pas encore de stratégie d'échantillonnage et de méthode d'analyse normalisées pour mesurer le SARS-CoV-2 dans les eaux usées. "Ces normes sont essentielles, sinon il sera impossible de comparer les populations entre elles, précise-t-il. Il y a beaucoup de travail à faire parce que c'est la première fois que l'épidémiologie des eaux usées servira au suivi et à la gestion d'une pandémie."

Le professeur Vanrolleghem et cinq autres chercheurs de CentrEau font d'ailleurs partie du groupe consultatif de recherche qui a été mandaté par le Réseau canadien de l'eau pour définir les normes d'un programme de surveillance nationale du SARS-CoV-2 dans les eaux usées. "Les travaux avancent rapidement et nous devrions déposer nos recommandations d'ici un mois", assure le directeur de CentrEau.

Entre-temps, la centaine de municipalités canadiennes qui ont adhéré à la Coalition eaux usées COVID-19 effectuent des prélèvements quotidiens de 1 litre d'eaux usées dans leurs usines d'épuration. "Ces échantillons sont placés au congélateur et ils seront analysés lorsque les protocoles d'analyse seront définis, précise le chercheur. Cela nous permettra de reconstituer l'évolution de la pandémie dans chacune de ces villes et d'aider à la gestion de la pandémie."
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