Les activités humaines augmentaient déjà l'érosion des sols il y a 4000 ans

Publié par Isabelle le 25/11/2019 à 14:00
Source et illustrations: INRA
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L'érosion des sols réduit la productivité des écosystèmes terrestres, ce qui change les cycles des nutriments et par conséquent impacte directement le climat et la société. Une équipe de chercheurs internationaux de l'Inra et l'Institut Max Planck ont enregistré les changements dans l'érosion des sols en analysant des dépôts de sédiments lacustres dans plus de 600 lacs à travers le monde. Ils ont montré que l'accumulation des sédiments avait augmenté ponctuellement de manière significative il y a déjà 4000 ans. A cette même période, le couvert forestier a diminué, ce qui est un indicateur clair de déforestation. Ces résultats, parus dans PNAS le 28 octobre 2019, suggèrent que les activités humaines ont intensifié l'érosion des sols bien avant l'ère industrielle.

Les sols sont à la base de presque tous les processus biologiques de la Terre. Sur des échelles de temps millénaires, leur vieillissement et leur érosion sont principalement contrôlés par les forçages climatiques et tectoniques. Sur le court terme, les activités anthropiques sont les principaux moteurs de l'érosion des sols. Cependant, le démarrage, et l'ampleur de l'impact humain sur l'érosion globale des sols restaient flous.

Des chercheurs de l'Inra et de l'institut Max Planck ont étudié 651 archives sédimentaires lacustres, en utilisant des bases de données radioélémentaires et polliniques déjà publiées, pour décrire et analyser la dynamique de la végétation en interaction avec l'évolution des transferts de matière par l'érosion des bassins versants. Les résultats montrent clairement une accélération à l'échelle globale des transferts de matière dans les bassins versants il y a 4000 ans. Cette accélération est attribuée aux activités anthropiques - mises en évidence par la réduction du couvert forestier à la même période – Cette ouverture du paysage a peut-être intensifié l'érosion des sols bien avant l'industrialisation au cours des trois derniers siècles.Ils ont daté l'âge des couches de sédiments lacustres et les taux d'accumulation de sédiments (SAR) grace à la datation au carbone 14. Il est intéressant de noter que 35% des sites étudiés présentent une augmentation des taux d'accumulation de sédiments il y a environ 4000 ans, ce qui coïncide également avec la réduction des fractions arboricoles présentes dans les enregistrements polliniques. Cette diminution de la fraction de pollen des arbres reflète les modifications de la couverture végétale, en particulier le défrichement des terres, lié à l'agriculture et la colonisation, susceptibles de mettre à nu les sols ce qui peut conduire à leur dégradation et à l'érosion par la pluie.

Les changements des SAR au niveau régional sont corrélés aux développements socio-économiques historiques des peuplements humains. Par exemple, l'augmentation des taux de sédimentation s'est produite plus tard en Amérique du Nord qu'en Europe. Cela correspond probablement à l'introduction tardive des pratiques agricoles européennes en Amérique du Nord après la colonisation. Au contraire, la diminution des SAR dans 23% des sites étudiés est probablement associée à une utilisation accrue de l'eau et à des pratiques de gestion des rivières.

Cette étude suggère que la déforestation par l'homme explique l'érosion accélérée des sols au cours des 4 derniers millénaires. Bien avant les influences récentes et brutales via les émissions de gaz à effet de serre, les activités humaines avaient déjà une influence sur le système Terre.


Echantillonnage et datation au carbone 14 de sédiments lacunaires
© Inra

Contact scientifique:
Jean-Philippe Jenny (04 79 75 86 49) Centre Alpin de Recherche sur les Réseaux Trophiques et les Ecosystèmes Limniques (CARRTEL)

Département associé:
Écologie des forêts, prairies et milieux aquatiques

Centre associé:
Auvergne - Rhône-Alpes

Référence publication:
Human and climate global-scale imprint on sediment transfer during the Holocene,Jean-Philippe Jenny et al., PNAS, www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.1908179116
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